
intention ; huit autres suicides, dont j’ai les crânes dans ma collection,
des soldats, des jeunes femmes, des artisans, des employés, etc. Dans tous
ceux-là, l ’organe de la circonspection avoit produit, par son grand développement,
une proéminence très-bombée à la région indiquée de la tête.
Cet exposé doit faire renoncer à l’idée trop généralement adoptée,
que le suicide est le plus souvent un acte de lâcheté, de courage ou
d’héroïsme, de légèreté, dè corruption de moeurs, ou d’un oubli total
des devoirs envers Dieu et les hommes.
Il résulte au contraire de ces observations, qu une activité dérangée
et exaltée de la circonspection doit être comptée parmi les causes les
plus puissantes et les plus fréquentes de la mélancolie, surtout de celle
qui détermine le penchant au suicide.
On rencontrera sans doute des têtes de' suicides par alienation , chez
qui l’organe de la circonspection n’avoit qu’un degré médiocre de développement;
mais il ne s’en suivroit point que cet organe n’eut pas été affecté
péniblement. La manière dont les autres parties du eorpssont organisés,
nous laisse ordinairement deviner à quelles maladies, de préférence
aux autres, elles sont disposées. Néanmoins nous savons qu’un certain
concours de circonstances peut agir sur ces parties tout-à-fait en sens
contraire de la disposition naturelle.Le hautain, chez lequel l’organe dê
la fierté domine, par son grand développement, sur tous les autres,
aura en cas d’aliénation partielle, plutôt des idées relatives à l’orgueil,
qu’à tout autre sentiment. J’ai pourtant cité des aliénés pareils, qui,
hors de leurs accès, ou dans l’état de santé, étoient des modèles de
soumission et de modestie. N’ai-je pas cité aussi plusieurs observations
de personnes qui, dans la folie ,'dans l’ivresse, dans une fièvre ardente,
faisoient des vers et delà bonne poésie, quoique auparavant elles n’eussent
eu aucun pressentiment de ce talent?
Je n’ignore pas que l ’idée qui place l’origine du penchant au suicide
dans une affection déréglée de l’organe de la circonspection, paroit
une extravagance à ceux qui, dans l ’étude des aliénations mentales,
suivent l’ancienne routine.
Comment altribueroient-ils une aliénation partielle quelconque à
1 état desordonne dune partie cérébrale , lorsqu’ils nient que les qualités
et les facultés morales soient des fonctions propres de ces mêmes
parties cérébrales? Et lorsqu’ils ne savent pas encore ce que c’est qu’une
alienation mentale partielle en général, comment pourroient-ils avoir
une idée nette du penchant au suicide, qui se montre le plus impérieux,
tandis que cependant aucun dérangement ne se fait remarquer
dans les autres qualités et facultés.
Mais depuis que j’ai démontré que chaque qualité ou faculté fondamentale
de lame est nécessairement affectée à un organe particulier;
que toutes les aliénations mentales ont leur siège immédiat dans le
cerveau ; depuis que j ai ramene dans ce volume les aliénations partielles
des qualités affectives a leurs organes respectifs; la manie érotique
à lorganede la propagation; 1 esprit querelleur, malfaisant, à l’organe
de la propre défense ; l’impulsion meurtrière à l’instinct carnassier,
et ainsi de suite ; depuis ce temps on conçoit sans peine que, de
meme, la mélancolie ou 1 ennui de la vie, le penchant an suicide enfin,
a sa source dans un organe particulier.
Cela pose, je demande à queLorgane on peut l’affecter raisonnablement?
Le penchant au suicide est certainement du nombre des pen—
chans ou des sentimens. Voulez-vous confondre ces malheureux avec
les aliénés par volupté, par orgueil ou par vanité ? Donnerez-vous la
mêmç origine au penchant au suicide, qu’à celui au vol, à la filouterie,
k la rixe, devenu involontaire et irrésistible par l ’aliénation?
Voulez-vous expliquer ce penchant par un dérangement total du
cerveau , par un bouleversement universel des qualités affectives? Alors
concevez-vous en même temps l’intégrité des autres qualités , que l’expérience
nous fait observer tous les jours?
O u i, il en est de cette folie partielle , Comme de toutes les aujfes.
Après que le germe en a existé long-temps, tout le cerveau commence
à souffrir; le dérangement de toutes les fonctions se fait sentir de
plus en plus, et enfin les lésions organiques, qui se forment successivement,
deviennent générales, cômme je l ’ai prouvé en traitant dans
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