
logement attachoient leurs petites provisions pour les faire rôtir. Je
tombai sans connoissance dans la cheminée. Voici comment on m’a
rapporté que j’étois placé : J’étois tombé sur le côté gauche, la tête et
une partie du corps dans la cheminée. Mes pieds, en s’allongeant dans
la chute, avoient rencontré la table de nuit qui étoit renversée sur
moi,
« Le lendemain , lorsque la fille de chambre vint pour faire mon
lit, elle rne trouva dans cette position et sans connoissance. Elle appela
du secours. On me mit au lit. M. C***, mon ami, m’a soigné dans ma
maladie,
: « Malgré tous les soins qui me furent donnés, je restai deux ou trois
jours sans reprendre connoissance. Je fus condamné par les médecins.
On me crut mort, et un officier fut désigné pour commander le bataillon
qui devoit me rendre les honneurs funèbres. Enfin, le second
ou troisième jour, je revins à moi, et l’on m’apprit tout ce qui m’étoit
arrivé. J’écrivis à ***, pour lui dire que je n’étois pas mort........
. « Après avoir repris mes sens, je fus atteint d’une fièvre nerveuse
très-violente. Je devins fort mal; je battois la campagne; je disois,
dans le transport de la fièvre, que j’avois des clous dans la tête; je me
figurois que le sang me sortoit par les oreilles; je ne sais pas si ce dernier
effet a eu lieu réellement. Voici les visions que j’ai eues:: Je ne puis
dire si c’est pendant le temps que j’ai été sans connoissance, ou après
avoir repris mes sens, et pendant les accès de ma fièvre,
r- « Il me sembloit que je m’élevois au-dessus des nuages, quelquefois
très-haut ; mais plus ordinairement dans la région moyenne. Je voyois
souvent l’image d’un homme couvert d’une armure de fer demi-brillante,
et armé de toutes pièces. Dans mes voyages aériens, j’ai
vu des choses fort extraordinaires que je ne me rappelle plus :
je passois rapidement des régions brûlantes aux régions glacées;
enfin je descendois quelquefois sur une espèce de terre, et dans de profonds
abymes ; je me promenois dans des prairies où je voyois quantité
de diamans et de fort belles choses que je voulois ramasser. On m’a dit
que mes mains faisoient en effet le simulacre de ramasser quelque chose.
D U C E R V E A-U. 3 a I
« Après avoir avalé pendant plusieurs semaines une grande quantité
de drogues, et particulièrement beaucoup d’éther, je parvins à une
convalescence qui étoit une autre maladie. Beaucoup de personnes ont
paru prendre part à mon rétablissement. J’allois dans les réunions de la
société, et je cherchois à me distraire par tous les moyens possibles.
Chez moi, je dessinois, quoique le médecin me l’eût défendu , parce
que j’avois la vue très-affoiblie. J’ai eu, pendant près de trois mois de
convalescence, des idées fort singulières, qui n’avoient aucune justesse;
elles étoient sans doute la suite de mes visions; je voulois m’élever en
volant, et pour cela j’avois imaginé de faire des ailes de carton : je
n’ai cependant pas misa exécution cette idée absurde ».
J’ajouterai que pendant sa convalescence, M. B*** a toujours conservé
les dispositions fières et orgueilleuses qui s’étoient antérieurement
fait remarquer en lui. Entre autres faits qui m’ont également été rapportés
par sa femme, je citerai celui-ci, qu’il auroit cru s’avilir en se
soumettant ou en permettant que sa femme se soumit aux actes domestiques
les plus simples. N’eût-il été question que de fermer une croisée,
ou d’apporter un verre d’eau , sa fierté se révoltoit à l’idée de le faire
lui-même, ou de le laisser faire à sa compagne; et il falloit appeler un
valet pour la moindre action de ce genre.
Maintenant, que le lecteur décide si l’on est autorisé à admettre une
analogie entre la hauteur physique et la hauteur ou l’élévation morale ;
s’il faut admettre deux organes essentiellement différens pour l’instinct
des hauteurs, et pour l’orgueil, ou s’il faut s’en tenir à un seul?
Mais, je le répète, de quelque manière que cette question soit résolue,
la solution ne peut point tourner au désavantage de l’organologie; car
quelle qu’elle soit, il est toujours certain que l’instinct des.hauteurs,
1 orgueil, l’amour de l ’autorité, ont leur organe dans le cerveau, et
que cet organe est placé dans la région que j’ai indiquée. Je laisse
encore au lecteur le soin de décider, s’il faut appeler la qualité fondamentale
à laquelle ce penchant se rapporte, sens de l’élévation,
estime de soi-même, amour-propre. L’orgueil, la fierté, la hauteur,
la présomption , l’envie de dominer, etc., sont des effets de la grande
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