
les formes que revêt le vol ! Combien est longue la chaîne, depuis le
larcin le plus insignifiant, jusqu’à la rapine et le brigandage!
Dans les procès, dans l’administration des biens des orphelins et des
pupilles, dans les relations commerciales, dans presque toutes les
manières de gagner sa vie , même dans beaucoup d’établissemens
créés ou protégés par le gouvernement, tels que les loteries, les
jeux, etc., partout je ne vois qu’escroqueries, filouteries, duperies,
vols, pirateries, pillage. Jamais le panégyriste le plus zélé de l’espèce
humaine, ne réussira à la disculper du penchant presque général à dérober.
Toute la différence consiste dans le plus ou le moins; chez l’un,
ce penchant est modéré par une organisation heureuse ; chez l’autre ,
par l’influence de l’éducation , l’empire de l’habitude ou la crainte des
châtimens; chez un troisième , le penchant vicieux est déterminé par
un organe tellement énergique, que les mêmes motifs qui eussent porte
tout autre à être honnête homme, ne peuvent qen sur lui. C’est le
degré de violence du penchant au vol qui devroit fixer l’esprit du juge
et du législateur. Le vol ou la valeur de l’objet volé sont des choses
accessoires; c’est la gradation du penchant, les essais que l’on a tentés
inutilement pour la correction , les récidives, l’indifférence du coupable,
le manque absolu de repentir, l’effronterie et l’insolence avec
lesquelles les voleurs font parade de leurs crimes; voilà ce qui devroit
attirer l’attention de l’observateur.
Aussi je ne trouve rien de plus approprié à la nature de l’homme,
que les institutions qui existent dans certains états. La première fois
qu’un individu se rend coupable d’un délit, on le séquestre , non pas
dans une maison de force, mais dans un établissement destiné à corriger
les coupables; et lorsqu’il a été préparé par des instructions
morales et religieuses à mener une vie régulière, et qu’il justifie des
moyens de subsistance, on le rend à la société. A chaque récidive,
quelque légère qu’elle soit, la peine est aggravée, et ce n’est que lorsque
des récidives multipliées prouvent que l’individu est incorrigible ,
qu’on l’exclut pour toujours de la société. Avant de prononcer cet arrêt
définitif, on évite tous les châtimens qui empêcheroient l’individu de
reparoître au milieu de ses semblables, dans le cas possible, qu’il changeât
de conduite. On regarde comme absolument contraires au but
que l’on se propose, antiphilantropiques et pernicieux, l’exposition
au carcan, la marque, la diffamation par les feuilles publiques, etc.
Quand une aussi sage législation pénale sera-t-elle généralement adoptée?
Combien n’en est-on pas éloigné encore dans un pays où presque
tous les jours, par des peines infamantes , on ôte au coupable repentant
les moyens de rentrer dans le sentier de l'honneur! On le force,
pour ainsi dire, à chercher son existence en s’unissant aux criminels
que la société a rejetés de son sein. Toutes ces bandes de brigands,
composées d’hommes marqués du sceau de l’infamie, qui exercent
leurs rapines sur les routes, et mêihe dans les villes, sont la preuve
frappante de cette tristeyérité.
On est forcé d’avouer que les moyens employés jusqu’à présent, pour
corriger les malfaiteurs, sont insuffisans. Dans les Annales politiques,
morales et littéraires, 1818, 24 octobre; audience du 23 octobre, il est
dit : «L’affaire dont la Cour d’assises s’est occupée aujourd’hui, prouve
d’une manière sensible et frappante, que la plupart des forçats libérés
meurent dans l’impénitence finale. Soit qu’ils aient eu Famé avilie par
le séjour du bagne, ou qu’ils soient naturellement enclins au crime,
presque tous reparoissent devant les Cours d’assises, souillés de nouveaux
forfaits ».
Histoire naturelle du penchant au vol dans l’état de
maladie, avec foiblessë d’esprit très-marquée.
Ici encore, j’extrais les exemples que j’ai cités dans la troisième
section du tome II.
« Parmi les jeunes garçons que l’on nous amena dans une des prisons
de Berlin (Stadtvogtey ) , il y en eut un qui fixa particulièrement notre
attention. Nous conseillâmes de ne pas le mettre en liberté, parce qu’il
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