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Le temps me manque pour énumérer encore les stations d’étude des différentes
cultures coloniales. Je les ai déjà mentionnées à propos de l’historique, mais il est
imi)ortant de rappeler que le laboratoire de chimie agricole est monté de façon à
pouvoir effectuer n’importe quelles recherches d’ordre chimique. Cette considération
est d'une grande importance pour les physiologistes. En outre un musée et un
laboratoire de zoologie ont été fondés; ils sont à leurs débuts, il est vrai et sont
spécialement dirigés en vue d "étudier les animaux utiles et nuisibles aux cultures dn
pays, mais ils n’en offrent pas moins de grandes facilités pour la zoologie générale.
Je crois même ne pas me tromper en disant que la tendance actuelle est d’embrasser le
champ le plus vaste possible. Ainsi: le directeur de cette section, M. Koningsberger,
vient de publier une substantielle étude snr le tripang, c’est-à-dire les liolotnries
pêchées dans l’Archiiiel malais et consommées en grande quantité par les Chinois.
Ce simple détail, montre qne l’étude des animaux en relation avec le règne végétal
n ’est pas l'exclusive préoccupation de cette section.
§ 3. S t a t i o n s Annexes.
J ’ai hâte d’arriver aux stations annexes de l’Institut. Je pourrais parler ici
dn Jardin de Tjikenmeuh qni couvre 7 2 ‘hectares dans la banlieue de Buitenzorg et
où l’on fait des essais de tontes les cultures coloniales. Je pourrais même parler
des biens-fonds considérables de Tjipetir, 1500 hectares environ, où des arbres à
gntta ont été plantés en grand qui assureront dans l’avenir de beaux revenus au
gouvernement des Indes, comme le font déjà les plantations de quinquina. Mais étant
limité par le temps, je dois me borner, car je voudrais donner quelques détails au
sujet de Tjibodas la perle scientifiipie de Java: un laboratoire doublé d’une maison
hospitalière, situé à 1500 mètres d’altitude environ sur les hancs du Mont Cuedéh.
C’est un petit chalet, adossé à la forêt vierge dont 283 hectares ont été et seront
réservés intacts pour l’étude des naturalistes. La propriété tout entière couvre
314 hectares. Je ne saurais décrire la poésie du lieu, une autre plume que la mienne
serait nécessaire. Un romancier, un poète, nous dirait le charme de ces vertes
pelouses descendant en pentes rapides vers le haut plateau de Tjipanas, il saurait
rendre la parfaite harmonie du parc arrangé et entretenu avec un soin tout maternel
par M. 'V^'igman, horticulteur hors de pair et surtout par M. Treub, le directeur, qui
est non seulement un savant, mais un artiste. Enfin il faudrait un peintre pour vous
montrer la forêt équatoriale des hautes montagnes de Java, telle qu’elle nous apparait.
On y pénètre déjà en sortant par la porte de la salle à manger située sur l’arrière de
la maison. Les gigantesques Rassamalas ( Liquidambar Alti ngiana) dont la taille
atteint celle des fameux Séquo ia de Californie, les figuiers (Eicus elast ica) à la
couronne immense, où s’ébattent des essaims d’oiseaux et des tribus de singes, les lianes
et les épiphytes de toutes sortes, les élégantes fougères arborescentes (principalement
les Al s o p h i l a ) et le fouillis des herbacées.
Je renonce à toute description et je dois me borner à indiquer seulement
l’emplacement et les ressources. On parvient à Tjibodas à cheval ou à pied. On
peut monter en voiture, soit depuis Buitenzorg, soit depuis Tjandjour, jusqu’à Tjipanas,
où se trouve le palais d’été du gouverneur général. La route la plus pittoresque est
certainement celle dn Pountjak, contrefort du Pangerango, volcan éteint, juxtaposé au
Guedéh et couvert de forêts impénétrables. Ce chemin conduit de Buitenzorg jusqu’au
sommet du col par une pente dont l’inclinaison ferait reculer tous les cheveaux
d’Europe, mais qui ne paraît pas intimider les poneys javanais. Arrivé sur le col,
à 1500 mètres d’altitude, on découvre tout-à-coup le panorama qni s’étend de Tjipanas
jusqu’aux lointaines montagnes du centre de l’île. Le tout est encadré, d’un
côté par le Cuedéh et de l’autre, par la prolongation de la chaîne du Pountjak qui
s’étend au loin vers l’Est et y forme plusieurs sommets de moindre importance.
Depuis le col, la route descend aussi rapidement vers l’Est qu’elle était montée
sur le versant Nord-Ouest et à 400 mètres en contre-bas on a atteint le sanatorium
de Tjipanas (Sindanglaia), où peuvent rester ceux qui préfèrent leurs aises à la vie un
peu aventureuse d’un endroit situé en dehors des chemins battus.
Depuis Tjipanas, un sentier à mulets s’élève en serpentant le long des flancs
du Mt. Cuedéh et nous conduit en une heure de cheval à la station même. Cette
dernière contient un grand laboratoire assez bien fourni d’instruments: microscopes
et autres; l’on y peut trouver même un certain nombre de réactifs.
Une minuscule usine à gaz, située derrière la maison, alimente les becs
Bunsen et les lampes pour l’éclairage des locaux.
Enfin, et cela est très important, un personnel spécial composé d’un
surveillant et d’une série d’indigènes habitués à ce genre de travaux, est capable de
rendre les plus grands services aux savants visiteurs. Il y a là en particulier un
Javanais nommé Sapihi n, qui connaît tons les sentiers de la forêt et qni vous mènera
directement et sans perte de temps aux lieux d’origine de toutes les espèces que vous
désirerez observer. Ceux qui ont herborisé en forêt vierge, apprécieront l’importance
de ces détails.
Ce personnel est également capable d’organiser en quelques heures une expédition
de plusieurs jours dans les parties élevées de la montagne. Une excursion de
ce genre est du plus haut intérêt, car en un jour et demi, il est possible d’atteindre
une altitude de 3100 m, au sommet du Pangerango, où l’on pourra récolter le fameux
Pr imu l a imper i a l i s . On pourra aussi visiter le cratère encore actif dn Guedéh et
y recueillir, presque au complet, toute la flore des volcans et solfatares de Java.
En passant, on admirera aussi Tjibeureum, un cirque rocheux où miroitent
et poudroient quatre cascades de belles dimensions, dont les eaux argentées tombent
par-dessus des rochers couverts de mousses multicolores et ornés de rhodendrons et
d’orchidées épiphytes.
An pied de cet escarpement croissent à foison, à côté des violettes et des
crucifères, indiquant l’infiuence d’un climat déjà froid, des Nepent h e s aux urnes
rubescentes et le Gunne r a , l’hôte de ce Nost oc singulier dont l’aire de dispersion
discontinue comme celle du Gun n e r a , est une des énigmes de la géographie botanique.
Au-dessus de Tjibeureum on peut observer aussi une source chaude très
abondante: Tjipanas, laquelle provoque la réapparition, à une altitude considérable,