quelle que soit l’allure qu’on lui fasse prendre, l’ânier ne
reste jamais en arrière ; muni d’un bâton, il ne cesse de
stimuler l’animal afin, dit-il, de ne pas compromettre la'
réputation de bon coureur qu’il ne manque jamais de lui
octroyer. Lorsqu’on prend une voiture, il est de bon ton
de se faire précéder d’un coureur nommé zais, qui écarte
les arabes qu’il trouve sur. son passage, en leur distribuant
des coups de kourbach (espèce de cravacbe). Le
cavalier est aussi précédé d’un zaïs. Tous ces bommes sont
des coureurs infatiguables. Sans cesse, ils sont devant les
chevaux ou à côté, même pendant de longues courses au
galop. Les personnes fortunées, les hauts fonctionnaires,
sont toujours escortés de quelques, cavas qui sont des
hommes à cheval et armés.
Près de la porte de Gabari, il y a une mosquée, celle
des mille et une colonnes, qui ne présente absolument rien
de remarquable, mais qu’on va visiter parce qu’elle occupe
l’emplacement de l’église de Saint-Marc, siège des anciens
patriarches d’Alexandrie, fondé par saint Marc, vers
l’an 50. Il paraît même, d’après ce que prétend saint
Grégoire-le-Grand, que cette fondation est due à saint
Pierre qui envoya à Alexandrie, son disciple, saint Marc.
Je dois mentionner ici un autre édifice chrétien-, aussi
converti en mosquée. C’est celui où se tint le conclave
des septante interprètes qui firent la version grecque de
la bible hébraïque. Il y a moins d’un siècle, les cellules
ou cabinets de ces savants théologiens étaient encore
presque dans leur entier, bien que le local eût déjà été
converti en une mosquée, nommée mosquée du Ponant.
En dehors et à peu de distance de la porte de Gabari,
est l’entrée de la nécropole ou des cal^combes. Elles paraissent
fort étendues, mais il est dangereux de s y
aventurer trop avant, à cause des éboulements qui s y
produisent, et aussi parce qu’il est presque impossible de
trouver un guide qui les connaisse bien. Je n ai visité que
les “premières salles, et je ne regrette aucunement de ne
pas avoir vu le reste. Quelques-unes de ces salles sont à
ciel ouvert ; les autres sont voûtées et ornées d’élégantes
A sculptures. Ces catacombes ne ressemblent pas a cenlles
de Naples et de Rome qui ne sont que de simples excavations
dénuées de toute prétention artistique. Dans ces
dernières, il n’y a rien pour plaire à la vue ; tout, inscriptions,
peintures, est destiné à parler à l’âme, à représen-
senter les mystères, les grandes vérités de la religion.
Dans un lieu destiné à rappeler le néant des choses
humaines, il ne faut rien qui puisse porter à s’en occuper,
à les admirer. Il est vrai qu’en parcourant nos cimetières,
nos cathédrales, et en contemplant les monuments qu’on
y a élevés, on est forcé de.convenir que les chrétiens des
derniers siècles ne le cèdent en. rien, sons ce rapport, aux
anciens Egyptiens ; mais aussi, on ne doit pas se le dissimuler
, notre foi n’est plus aussi vive que du temps des
persécutions et des martyrs.
En revenant, je me suis un peu détourné pour voir ces