de sa mère, de plusieurs cousins, et d’une femme de
chambre. Comme cette famille se proposait de visiter en
passant, les principaux travaux de l’Isthme, nous devions
faire route ensemble jusqu’à Kantara situé sur les
confins du désert de Svrie.
Des barques attelées de dromadaires qui devaient continuellement
aller au trot, nous attendaient. Aussitôt
que nos bagages y furent transportés, Son Altesse Royale
prit place dans la cabine qui lui était préparée, ét nous
nous mîmes en marche. Dès ce moment, nous devenions
les hôtes de la Compagnie de l’Isthme qui sut se rendre
digne de l’honneur que lui faisait Son Altesse Royale.
A quelque distance de Zaggazig, le canal coupe une
ancienne, branche du Nil, nommée Pélusiaque, qui se
rend dans le lac Menzalèh. Cette branche autrefois navigable,
est aujourd’hui ensablée dans presque toute son
étendue, et ne reçoit un peu d’eau que pendant les fortes
crues. Nous rencontrâmes beaucoup de barques chargées
de marchandises, particulièrement de coton, et portant
des Arabes qui allaient aux travaux ou en revenaient,.
Comme on le sa it, ces travaux ne peuvent être
exécutés qu’à la condition d’obtenir des travailleurs
égyptiens. Des Européens ne pourraient pas supporter les
influences du climat ; il serait d’ailleurs impossible de
s’en procurer en nombre suffisant. En effet, pour que
les travaux marchent convenablement, il faut continuellement
25,000 ouvriers. Si on fàisait un appel aux
hommes de bonne volonté, il n’en viendrait pas un seul.
C’est l’opinion de M. de Lesseps lui-même ; l’Égyp-
tien est paresseux et n’aime pas à se déplacer. Il y à
donc eu nécessité de recourir au travail forcé ; mais afin
de le rendre le moins pénible possible, la durée de la
tâche imposée à chaque homme, a été limitée à un mois.
Pour ne pas être obligé de rappeler trop souvent les
mêmes individus, on n’a exempté personne, pas même
les habitants des parties les plus reculées • ainsi, des
travailleurs .viennent de plusieurs centaines de lieues. Ce
travail forcé est rétribué, ce qui établit une différence
avec celui imposé par le gouvernement pour tout Ce qui
est d’utilité publique. I c i, l ’homme est simplement
nourri, et rien de plus, tandis que la compagnie'donne
un salaire qui permet à chacun, lorsqu’il a terminé sa
tâche, de reporter chez lui un léger pécule. La journée
de travail est fixée à un franc, ce qui serait insuffisant
pour un Européen ; mais l’Egyptien a peu de besoins, et
tout lui est fourni, à prix coûtant, par la compagnie,
dont les immenses magasins renferment ce qui peut être
nécessaire, non-seulement aux ouvriers, mais encore aux
divers employés de l’administration. Pour le logement, on
a établi des campements consistant en des agglomérations
de huttes en terre. Des infirmeries bien tenues et abondamment
pourvues, se trouvent sur divers points. Je les
ai visitées toutes, et je dois dé’clarer que je n’y ai trouvé
aucun malade; preuve manifèste que les travaux ne sont