besoins et leurs plaisirs. S’ils ont des %créatures qu’ils
favorisent, qu’ils enrichissent, c’est parce qu’ils ne peuvent
agir seuls, qu’ils doivent être secondés par des agents de
leurs volontés. Mais entre eux et leurs ministres, il n’y a
aucune confiance, aucune affection; lu n se défie de
l’autre. Celui qui a été le plus comblé de faveurs, est
souvent le plus à craindre, car ces faveurs peuvent être
retirées aussi facilement qu elles ont été accordées.
Le mode de succession au pouvoir, déterminé par le
Coran, est la cause qui arrête le souverain dans ses élans
généreux envers ses sujets, et lui fait dédaigner toute idee
de progrès. On sait que le pouvoir est dévolu au plus âgé
des membres de la famille. Or, le souverain se soucie
fort peu de travailler pour les intérêts, la gloire, de celui
qu’il considère comme un ennemi. Je dis un ennemi, car
tous les membres de la famille régnante vivent ordinairement
entre eux, dans un état d’hostilité et de défiance
perpétuelles. La défiance est poussée si loin, que souvent
le Prince héréditaire va attendre dans l’exil,* loin de sa
patrie, le' moment où il sera appelé à régner, et ce moment
il s’efforce quelquefois de le hâter. L’histoire des
souverains de ce pays est riche en événements tragiques.
Ismaïl-Pacha, le Vice-Roi actuel, a compris qu’une ère
de prospérité peut encore s’ouvrir pour 1 Egypte, mais que
pour cela, bien des-réformes sont nécessaires. Son esprit
éclairé, son excellent coeur, 1 exemple des nations européennes,
les lui ont assez indiquées ; mais il est arrêté par
des difficultés qu’il considère comme insurmontables. La
plus importante de ces reformes, celle dont il s occupe
particulièrement, concerne 1 ordre de la transmission du
pouvoir de manière que le fils succède au père. Ainsi, le
souverain verrait dans le bonheur, la prospérité de son
peuple, le bonheur, la prospérité de ses descendants. Ce
peuple ne serait donc plus pour lui, une proie fugitive
qu’il faut se hâter de dévorer afin de n’en laisser que la
moindre part possible à celui qui aspire à lui succéder.
L’étranger jouit en Egypte d’assez beaux privilèges ;
ce n’est pas lui qui a sujet de se plaindre ; mais le peuple
gémit, reste avili. Il importe donc qu’on s’occupe de ses
besoins, qu’on travaille à le tirer de cet état d’abrutissement,
de dégradation, dans lequel il se traine depuis
des siècles. La femme est opprimée ; il faut qu’on la
relève.
Il est incontestable que la loi de Mahomet est un puissant
obstacle à l’amélioration morale et physique des
peuples. C’est elle qui s’oppose à l’émancipation de la
femme. Il y aurait ici à lutter contre l’obstination et le
fanatisme de la caste sacerdotale qui entraîne et remue
le peuple. Pour ce qui est de la classe élevée et éclairée,
déjà un grand relâchement s’est introduit parmi elle, et