composaient,[une dame habillée à l’européenne et qui s’abritait
sous* un parapluie. On nous dit qu’elle était anglaise
et allait rejoindre son mari, médecin établi à Khartoum.
Nous admirâmes un si grand courage et la confiance
qu elle avait en ses compagnons de voyage. Mais il n y
avait rien à craindre pour elle ; ces hommes que nous
qualifions de barbares, savent toujours respecter ceux
qui se placent sous leur protection. Hélas, que n’en est-il
toujours ainsi dans notre Europe civilisée !
Pendant qu on était occupé à faire du charbon, nous
parcourûmes le campement l’où on voyait épars sur le.
sol, un grand nombre de ballots et de caisses. Il y avait
beaucoup de tentes et quelques abris -formés de nattes
soutenues par des piquets et des branches d’arbres. Les
marchandises consistaient surtout en superbe gomme
arabique, ivoire, plumes d’autruches, séné. On nous
assura que des esclaves étaient cachés sous les tentes,
mais il aurait été très-difficile de les voir, car ce commerce
n est plus toléré dans toute l’étendue des contrées
soumises à la domination du Vice-Roi d’Égypte. Parmi
ces hommes qui étaient alors campés, se trouvaient des
Ethiopiens, des habitants de Khartoum au teint fortement
basané, aux traits cependant assez fins et expressifs.
Nous visitâmes ensuite le village, où nous ne trouvâmes
que des femmes, des vieillards et des enfants. La
plupart des hommes étaient absents, les autres portaient
du charbon sur notre vapeur. Nous entrâmes dans quelques
maisons, où nous vîmes les femmes occupées à
broyer du doürrah entre deux pierres rondes et plates,
dont une était fixe et l’autre tournait sur un pivot au
moyen d’un morceau de bois placé dans un creux pratiqué
près du bord. La farine du dourrah sert à faire
des galettes qu’on cuit en les étendant sur le sable
chauffé en brûlant dessus quelques poignées de broussailles.
Ces galettes, des dattes sèches, de l’eau, voilà la
nourriture de ces habitants. Le café est un luxe qu’ils se
permettent rarement. Ils réservent pour le commerce, les
volailles qu’ils élèvent et les troupeaux qu’ils engraissent.
Les femmes de Korosko ont une figure douce et intelligente
- elles nous disaient : Vous êtes dans un pauvre
petit endroit, mais Assouan est une très-grande ville où
vous trouverez de belles et bonnes choses.
Plus bas, sur la rive opposée, près du village d’Amada
ou Hassaïa, sont les ruines d’un très-petit temple converti
autrefois en église par des chrétiens qui l’avaient
surmonté d’une coupole. Ses parois, ses piliers, sont
couverts d’hiéroglyphes en partie cachés par un couche
de terre sur laquelle on a peint des images de saints.
La façade de ce temple est tournée vers le Nil. On y
entre par une porté aux deux côtés de laquelle sont les
débris de l’ancien pylône. Dans le portique, qui a environ
seize pas de longueur, on voit quatre rangées de
pilastres, et dans la dernière, l’intervalle qui les sépare