qu’un crâne dépouillé ou ne conservant que quelques
parties noires et informes. En mettant la mieux conservée
de toutes ces têtes, en regard des figures tracéés sur les
murs des temples et des palais, il serait difficile de constater
une ressemblance quelconque. Mais il n’en' est pas de
même de celle que j ’ai trouvée à Thèbes; c’est, sous tous
les rapports, conformation, traits de la figure, la tête de
l’ancien Égyptien. Cette belle et précieuse antiquité m’a
été donnée pour cinquante centimes et la moitié d’une
pomme. J ’ai eu occasion de la montrer à bien des connaisseurs,
ét je puis dire qu’elle a excité leur convoitise.
Il n’est pas étonnant que les fellah dont les ancêtres sont
venus de l’Arabie subjuguer l’Égypte et asservir ses
habitants, présentent une conformation différente de celle
de ce peuple qui, avant eux, occupait le pays. Les Coptes,
bien que descendants de la race égyptienne des anciens
temps, offrent peu de ressemblance avec les figures des
monuments de l’Égypte, sans doute parée qu’ils se sont
abâtardis en mêlant leur sang à celui de leurs conquérants.
C’est dans la basse Nubie qu’on retrouve les caractères
primitifs. Les Baxâbra ou Berberins qui habitent
la vallée du Nil, entre la première et la seconde cataracte,
sont certainement les descendants de ceux des anciens
Égyptiens qui ont cherché leur indépendance sur un sol
étranger.
Le soir, nous eûmes un concert donné par les Arabes
chargés de la manoeuvre du vapeur et de la barque, auxquels
s’étaient joints quelques Thébains. Il consistait en
chants monotones, sur une gamme de trois à quatre notes,
avec accompagnement de darabokë, instrument favori
du peuple. Jamais les Arabes ne voyagent sans leur
darabokë, et leur récréation de prédilection, est de
s’accroupir en rond, pour exécuter des chants avec refrain,
dont le motif est toujours un sujet religieux. Les mots
allah, abouceni, sont sans cesse répétés.