tentes étaient formées d’une double couche d’étoffes : à
l’extérieur, une forte toile ; à l’intérieur, un magnifique
damas. Elles appartenaient au Vice-Roi qui s’en servait
pour ses excursions dans le désert.
Le 5 s nous étions sur pied de grand matin, car nous
devions partir à sept heures. C’est, une rude besogne que
la levée d’un camp : il faut abattre, plier les tentes,
tout emballer et charger sur des chameaux. Les cuisiniers
sont les premiers levés ; ils ont à préparer le premier
et second déjeuner. La halte du milieu du jour
est très-courte et permet à peine de dresser la tente-salon,
de, sorte que tout doit être prêt à être servi. On n’allume
alors du feu que pour faire le café.
Notre caravane était imposante ; on ne se souvenait
pas d’en avoir vu une semblable dans cette partie du
désert. J ’eus l’honneur d’être admis à côté de Son Altesse
Royale, dans une voiture de désert du Vice-Roi.
Nous suivions une route construite par Abbas-Pacha, de
Tor au couvent. La plaine située entre la mer et la chaîne
sinaïtique, est unie, toute couverte de blocs erratiques
semblables à ceux qui se trouvent entre Suez et les fontaines
de Moïse, seulement ils sont en général plus gros ;
beaucoup ont certainement deux mètres de diamètre. Il
faisait beau et chaud, ce qui contrastait avec l’aspect
des hauts pics que nous avions à notre droite, et dont
les sommets étaient couverts de neige. Quelques tamaris
de forte taille sont les seuls arbres qu’on rencontre le
long de cette route.
A six lieues de Tor, la route quitte la plaine et s’engage
dans une vallée qui se continue jusqu’au couvent,
mais est devenue impraticable dans une grande partie de
sa longuéur. Cette vallée est interrompue par une vaste
plaine qui a une étendue de sept quarts de lieue dans
l’endroit où nous la traversâmes. Comme il se trouvait
une bonne source à l’entrée de cette vallée et qu’il était
environ midi, nous fîmes halte et la tente fut dressée
près d’un acacia très-épineux.
A une heure et demie, nous nous remîmes en route,
mais la Vallée était tellement encombrée de blocs de
toute grosseur, que nous dûmes abandonner la voiture
et continuer à cheval ou à âne. Nous étions dans la région
des roches yolcaniques qui forment toute la chaîne sinaïtique.
Les rochers à travers lesquels nous marchions, consistent
en un granit de couleur grisâtre, à petits grains et
assez friable. Le feldspath y est en faible proportion; le
mica, le quartz particulièrement, en forment presque
toute la masse. Cette vallée est parcourue par un cours
d’eau qui entretient une belle végétation. On y trouve
des palmiers, des tamaris-, la coloquinte, la vergerette
âcre, une superbe bugrane à grandes fleurs d’un rosé
.tendre, une jusquiame à larges feuilles très-épaisses et
à fleurs jaunes ; un grand nombre de graminées, telles
q ue, des massettes, des roseaux, des laîches, des joncs,
des méliqués, des brizes, des paturins. La coloquinte est
très-commune dans toute la presqu’île; elle étale sur le