pouvait être la mission de ces religieux, et ils étaient
assez nombreux, dans une localité environnée de diverses
tribus arabes dont ils ne tentaient même pas la
conversion. Ils auraient dû y mener une vie partagée
entre la prière, l’étude et le travail ; mais malheureusement,
ils s’adonnaient au plaisir de la chasse, plaisir
qui, lors de notre arrivée, venait d’avoir des suites
bien déplorables.
Dans la Basse-Nubie et la Haute-Égypte, à partir de
Thèbes, ce ne sont pas les terres qui sont imposées,
mais bien les roues des sakyèh et les palmiers en rap-
, port. Un des religieux étant sorti pour chasser, se disposait
à tirer des pigeons perchés sur des- palmiers.
Le propriétaire du tèrrain vint pour s’y opposer, représentant
que ces palmiers lui appartenaient, et déclarant
qu’il ne souffrirait pas qu’on endommageât des
fruits pour lesquels il payait l’impôt. Le religieux voulant
passer outre, le fellah saisit l’arme par le canon,
et au même instant, le coup partit, la charge l’atteignit
en pleine poitrine et l’étendit roide mort.
Cet événement mit toute la population en émoi, ,et
eut au loin un grand retentissement. On prétendit que
le religieux avait tiré ; que, par conséquent, il y avait
eu homicide volontaire. L’inculpé, de son côté, assurait
que le coup était parti par la seule imprudence de la victime
qui était venue brusquement saisir l’arme et avait
ainsi pressé la détente. Quoi qu’il en soit, l’affaire fut
déférée au grand Conseil siégeant à Alexandrie, auquel
on adjoignit le consul autrichien, et l’auteur de cette
mort, sans doute bien déplorable, dut subir une longue
détention. L’inculpation de meurtre fut écartée, mais
en considération que l’accident résultait d’une atteinte
portée à la propriété de la victime, le religieux se vit
condamner à une réparation pécuniaire fixée à la somme
de vingt-cinq mille francs.
Je dois dire que peu de personnes s’intéressaient au
malheureux franciscain; on était.assez d’accord pour
blâmer un religieux qui consacrait à un amusement mondain
, un temps qu’il aurait dû utiliser d’une manière plus
conforme au caractère dont il était revêtu.
Pour moi, je ne puis assez admirer la population arabe
voisine du couvent ; elle s’est réellement montrée calme
et prudente dans cette fâcheuse circonstance. Qu’auraient
fait quelques religieux , si des milliers de forcenés ne
respirant que vengeance, étaient venus les attaquer ? Mais
je l’ai déjà d it, les Arabes qui habitent l’Égypte, sont
bons, doux, et ne demandent qu’à Dieu et à leurs juges,
satisfaction du mal qu’on leur fait.
L’île de Philæ a pour base un rocher de granit; elle
s’élève assez pour être à l ’abri de toute inondation. Sa
plus grande longueur est d’environ douze cents pieds;
sa largeur ne dépasse pas quatre cents. Elle est recouverte
d’une belle végétation, surtout sa partie septentrionale
, où s’est formé un petit village habité par des