marche, il s’attendoit à les voir passer des injures
aux coups, comme font ceux d’Europe en pareille
circonstance , mais que , tout au contraire, ils se
saluèrent, se parlèrent très - raisonnablement, et
qu après s’être aidés mutuellement, iis se quittèrent
avec beaucoup de politesse. Ce récit n’est
pas plus exact que ce qu’on rapporte sur ia police
He Peking.
Les rues de cette capitale sont beaucoup plus
larges que celles des villes de province ; mais si
elles ont cet avantage , elles ont le défaut, n’étant
point pavées , d’être remplies de poussière oû de
boue. On y rencontre un grand nombre d’hommes
dans certains endroits. Les femmes y vont plus
librement qu’ailleurs, et nous en vîmes plusieurs:
mais parmi cette quantité de personnes qui vont
et viennent dans Peking, il ne faut pas croire ,
d après certains missionnaires, que c’est à ceux qui
sont à cheval ou en voiture à prendre garde de
toucher les passans, et non à ceux-ci à se déranger
, et que les grands même craindroient de
heurter un vendeur d’allumettes. Tandis que nous
marchions dans les rues de Peking, nous fûmes
témoins que les passans laissoient la voie libre aux
charrettes, et sur-tout aux grands; nous remarquâmes
que ceux qui étoient en voiture ou à
cheval, non-seulement cédoient le chemin à ces
derniers, mais encore qu’ils inettoient pied à terre.
Comme nous revenions de chez l’empereur, les
soldats qui nous accompagnoient, poussoient rudement
et coudoyoient indistinctement tous ceux
qui obstruoient le chemin. II y a loin de là à l’attention
dont parlent les missionnaires , et les passons
qui se dérangeoient pour nous, étoient bien
forcés de le faire pour leur propre sûreté. Cette
politesse qu’on a tant vantée dans les Chinois, ne
s’exerce pas toujours librement, et souvent elle est
exigée d’une manière si absolue, qu’il est impos*-
sible qu’elle n’ait pas lieu. Le motif qui fait faire
certaines choses dans ce pays, n’est pas toujours
tel qu’il paroît au premier coup d’oeil. Les filles
publiques, par exemple, suivant plusieurs auteurs,
n’habitent pas l’intérieur des villes, et cela, disent-
ils , par décence. II est certain que ces femmes
vivent dans les faubourgs ou sur les rivières ; mais
croire que ce soit par un motif de décence , c’est
se tromper. Les bateaux occupés par des filles publiques
( a ) , soit à Quanton, soit dans les autres
lieux où j’en ai rencontré , sont rangés à côté les
uns des autres : tout le monde les voit, ainsi que
les hommes qui les fréquentent. Les gens riches
font des parties de plaisir sur la rivière, dans des
barques faites exprès, et y appellent autant de filles
(a) Ces femmes vivent plusieurs ensemble, sous la direction
d’un homme qui répond de leur conduite.