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de leur pays , et principalement de celles de l’empereur,
emploient toujours des termes emphatiques
; ils ont pensé, par exemple , que le nombre
neuf mille neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, rendu
très-longuement dans leur langue, exprimeroit
beaucoup mieux la richesse du souverain , que
i’énumération plus simple de quelques milliers.
Us ont également exagéré la quantité des barques :
appelées Long-y-tchouen, occupées à transporter
les pièces de soie destinées pour l’usage de la
cour. Il y en a, disent-ils , trois cent soixante-
cinq ; mais en adoptant ce nombre , et évaluant
la charge de chaque barque à cinq cent mille
francs , elles porteroient en soie , en coton et
autres objets, une valeur de plus de cent quatre-
vingt-deux millions, somme qui surpasse de beaucoup
le terme assigné par plusieurs auteurs , au
tribut des provinces , en soie, coton et autres
productions.
II résulte donc qu’il ne faut pas adopter sans
examen tout ce que les Chinois racontent de leur
pays, ou du moins qu’il est nécessaire de le réduire
à sa juste valeur. Le P. du Halde , dans ce
qu’il dit de l’envoi k Peking de quarante millions
de sacs de riz, a fixé trop haut le poids du sac.
L’usage k la Chine est qu’il faut quatre boisseaux
pour former un sac ; o r , le poids du boisseau n é-
tant que de dix livres chinoises , le sac ne pèse
SUR LES CHINOI S .
que quarante livres (a) , et non cent vingt. D’après
cela, les quarante millions de sacs du P. du
Halde, au lieu de donner quatre milliars de livres
pesant de riz , n’en donnent plus qu’un milliar
neuf cent soixante et quinze millions , ou seize
millions soixante - deux mille cent quatre-vingt-
seize pics, q u i, k dix francs le pic , font cent
soixante millions en argent, somme égale k celle
que j’ai assignée pour le produit du second dixième
de la seconde récolte des provinces méridionales.
On se persuadera aisément, d’après ce que je
viens de dire, que les revenus de l’empire Chinois
sont considérables, mais bien au-dessous du
montant de la note remise par les mandarins aux
Anglois ; et pour s’en convaincre encore , il suffit
de considérer le produit des douanes. Les droits
détaillés, province par province , dans l’ouvrage
des missionnaires , ne donnent, selon eux, que
quarante-huit millions. Si, dans un pays aussi
vaste que la Chine, oit le commerce intérieur est
très-actif, les douanes ne rendent que quarante-
huit millions , on doit en conclure que les autres
revenus suivent la même proportion , et qu’ils
sont loin par conséquent d’atteindre quatorze cent
quatre-vingt-cinq millions.
(a) Mission,, tome VII, page (¡6; et tome IX, page
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