
Peking, quarante millions cent cinquante - cinq
mille quatre cent quatre-vingt-dix sacs de riz de
cent vingt livres chacun, ce qui fait quatre milliars
huit cent dix - neuf millions de livres de riz : o r ,
pour conduire cette quantité , il faudroit quarante-
huit mille cent quatre-vingt-six barques, puisqu’elles
ne portent chacune que huit cents pics
[p8,4oo livres ] , et ne font qu’un seul voyage.
Les Chinois parlent bien de neuf mille neuf
cent quatre-vingt-dix-neuf barques; mais les mandarins
nous ont assuré qu’ils n’en avoient jamais vu
ou compté au-delk de quatre kcinq mille. M. Van-
braam, qui a adopté le même nombre de neuf mille
neuf cent quatre-vingt-dix-neuf barques, en conclut
qu’on envoie des provinces à Peking sept cent
cinquante millions de livres de riz ; mais pour les
porter il faudroit au moins sept mille six cents
barques , et il est reconnu qu’elles n’existent pas.
La vérité est que l’empereur ne fait venir Peking,
ni cette dernière quantité de riz , ni celle mentionnée
par le P. du Halde; elle y seroit inutile ,
et je m’en vais en donner la preuve*, si l’on suppose
un million d’habitans dans cette c,apitale, il
ne leur faudra pour une année, à deux livres de
riz par jour pour chaque individu, que sept cent
trente millions de livres ; et certainement l'empereur
ne nourrit pas toute la ville. On voit clairement
que le P. du Halde et M. Vanbraam se sont
trompés
trompés dans leurs calculs : ce dernier ajoute
de plus, que cette quantité de riz sert à payer
la plus grande partie des troupes Chinoises , et
celles qui sont attachées à la cour ; mais il ne fait
pas réflexion que l’armée est répandue dans tout
iempire, et qu’elle y reçoit sa nourriture ; il n’est
donc pas nécessaire d’envoyer à Peking les sept
cent cinquante millions de livres de riz , puisque
ceux qui doivent les consommer n’y demeurent
pas.
L’empereur entretient à Peking cinq mille mandarins,
auxquels il fait délivrer du riz, de l’argent
et du sel ; en y ajoutant les Tartares des huit bannières,
qui sont au nombre de quatre-vingt mille,
îes eunuques et les gens du palais , le total des
personnes entretenues par l’empereur, sera de
cent mille, pour lesquelles il faudra par année, à.
deux livres de riz chacune par jour, la quantité
de soixante-treize millions de livres pesant de
riz, dont le transport exigera seulement neuf cent
douze barques. Mais , quand on supposeroit que
l’empereur donne des vivres au double de personnes
, et même au quadruple, ce qui n’est pas
probable, cela ne demanderoit encore que trois
mille six cent quarante-huit barques , nombre fort
au dessous de celui de neuf mille neuf cent quatre-
vingt-dix-neuf. II est facile de se convaincre, par
ce calcul, que les Chinois, en pariant des richesses
TOME III. G