396 O B S E R V A T IO N S
doit avoir, est de ne pas s’approcher de la côte de
plus de trois qùarts de lieue. Les vaisseaux mouillent
en dehors de Manille, à trois quarts de lieue de
distance et au-delà de la barre : c’est aussi le rendez
vous de ceux qui, étant entrés dans la rivière,
lie peuvent y compléter ieür chargement.
H ABITANS DE MANILLE.
On porte à trois mille le nombre des habitans
de Manille, parmi lesquels tous ceux qui jouissent
de quelque considération ne sortent qu’en voiture.
Le gouverneur va à six chevaux, précédé dë plusieurs
cavaliers : l’usage est de s’arrêter lorsqu'il
passe. Le procureur fiscal, les auditeurs , le lieutenant
de roi et l’évêque vont à quatre chevaux :
tes particuliers n’en peuvent mettré que deux. Le
cocher se place comme ies postillons chez nous ;
les voitures viennent ordinairement du Bengale ,
on en fait aussi à Manille sur des modèles An-
glois. L’entretien d’un équipage coûte peu ; il est
possible d’avoir pour vingt à trente piastres uné’
paire de chevaux, et leur nourriture et lé cocher
n’en demandent que six ou huit par mois.
La femme du gouverneur et quelques dames de
distinction seulement s’habillent à l’européenne ;
les autres ne se servent point de poudre, et leurs
cheveux sont relevés et noués sur le derrière de
la tête , oit tombent en nattes sur les épaules :
SUR LES ÎL E S P H I L I P P IN E S . 397
en général, elles mettent peu de goût dans leur
coiffure ; elles ont des jupes courtes , des corsets
busqués, des talons fort élevés, et portent presque
toutes autour du cou une chaîne d’or avec un
1 médaillon qui contient quelques reliques. Les
hotnmes s’habillent mieux, mais ils ont l’air un
peu empesé.
La femme a le soin du ménage ; le mari ne s’en
mêle que pour donner de l’argent, qu’il va chercher
à la bodega [ magasin ] ; lorsque le sac de
mille piastres est vide, la femme en redemande un
autre.
Il y a peu de divertissemens à Manille ; on se
rassemble le soir dans quelque maison. La société
est triste et froide ; les demoiselles chantent ou
touchent le piano : les dames sont ordinairement
d’un côté et les hommes de l’autre.
Les femmes ont la voix un peu élevée, et chantent
du gosier ; elles fument toutes ; les cigares
des dames sont de cinq à six pouces de lo n g , et
grosses comme'un bon doigt.
J’assistai à Manille à plusieurs bals, entre autres
à celui que donna M. d’A vala, commandant de
la marine. Le gouverneur, sa femme et toutes
les personnes de distinction de la ville avoient
été invités. L’archevêque et le grand vicaire s’y
raidirent, mais ils se tinrent dans une pièce
vçisirie de celle où l’on dansoit. On dansa des