PREMIÈRE PARTIE _ CHAPITRE I
polémiques. En général on recloute les guerres de
pliime. Elles avancent peu la science et donnent aux
belligérants plus d'ennuis que de profits. Combien de
botanistes cependant se sont vus poussés par hasard
in^sque malgré eux, à une polémique! Le cas est assez
Irequent pour qu'il soit utile de penser d'avance aux
moyens de l'éviter.
Le meilleur est de travailler dans une direction régubore,
méthodique, un peu lente, comme de faire une
bore, une monographie, un mémoire sur quelque suiet
vaste et difficile. Quand on a le honbeur de s engager
dans un travail de cette nature, les écrits hebdomadaires
on mensuels passent sans attirer beaucoup votre attention.
S'ils contiennent quelque chose d'erroné ou qui
vous déplaît, vous êtes trop absorbé pour répondre. Vous
laissez le temps faire son oeuvre, de découvrir la vérité
i lus tard il peut se présenter une occasion de réclamer
mais alors ce sera sous une forme moins directe, qui
n engagera pas de polémique.
Un excellent système pour éviter les querelles est
d employer le plus possible le mode succinct etréguher
de description introduit par Linné. Quand on exprime
les caractères d'une plante en disant : Pelala 5
ohUnga. Stamina 10, UseraUa, etc., on n'a guère
1 occasion ni la place d'ajouter des réflexions sur les
travaux ou les erreurs d'autrui. Tout au plus peut-on
glisser quelquefois une parenthèse, comme : (nec
ut chxit N ) ; mais ce n'est pas une forme blessante.'
Au contraire, lorsqu'on étale en langue vulgaire deux
oil trois pages de texte pour une espèce, et qu'on
parle de la graine avant la feuille, ou de la fleur avant
la racine, comme cela se faisait dans le xvi® siècle
rien n'empêche les phrases incidentes qui peuvent pro-
TENDANCES MORALES ET liNTELLECTUELLES 111 ">')
voqucr des réponses. Exemple (1) : « Un excellent botaniste
croyait avoir trouvé chez nous quatre Méhlots;
moi, je venais justement d'étudier nos Mélilots tout un
été, et je n'eus pas de peine à lui faire voir que nous
n'en avions que deux... J'avais trop ouvertement raison
pour qu'il pensât à se regimber sur l'heure. Mais, quinze
jours après, il paraissait avoir perdu tout souvenir de
mes opinions en matière de Mélilots. » Ne tremhle-t-on
pas à l'idée de la guerre que ces Mélilots ont peut-être
a lumée dans un département français? Je cite cet
exemple ridicule pour rappeler qu'une cause assez
ordinaire de polémique est d'attacher trop d'importance
à des détails. On a raison de classer et de décrire le
mieux possible les espèces et leurs variétés; c'est très
important, mais d'une manière générale plus que dans
tel cas particuher. Il y a environ 120,000 espèces de
végétaux. Soit A l'importance de les bien distinguer;
le degré d'importance de traiter une d'entre elles convenablement
n'a plus que la valeur de .
1 ¿iU, UU(J
Le défaut d'une saine appréciation de l'étendue de la
science et de la valeur de ses diiïerentes parties est
aussi une source de préjugés ou de préventions qui
jeuvent conduire à des polémiques.
Par exemple, la science est de tous les pays comme
de tous les temps. Mêler des idées patriotiques avec des
idées de botanique est aussi peu fondé que mesquin.
Il n'y a pas de botanique allemande, française ou anglaise.
Même les flores locales intéressent la botanique
en général, car on est obhgé partout de les consulter
•
(1) Chardons nanceïens, par le D^ Hussenot, qui n'est rien, etc., etc.
n-8o, Irc édit., Nancy, 183o; édit., ibid., 1836, 213 pages. C'est le pamplilel
le plus extravagijnt que l'amour-propre blessé ait fait naître en botanique.
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