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PREMIERE PARTIE - CHAPITRE XVIII
g 3. — DU STYLE DOTANIQUKD' ANS LES LANGUES MODEUNES.
Il y a dos qualités à rechercher et des défauts à éviter,
soit dans toutes les langues modernes, soit dims
telle ou telle kngue en particulier.
Une qualité désirable dans toutes est que Fauteur
emploie les mots, les noms et les termes usités dans la
science. Gomme ils dérivent du grec ou du latin, ils sont
cosmopolites. Leur emploi a Tcivantage de rapprocher
les ouvrages écrits dans les diverses langues, de faciliter
leur comparaison et de faire pénétrer dans le public
des termes qu'il est bon de lui faire connaître. Les
mêmes motifs qui font désigner les genres et les espèces
par leurs noms botaniques doivent engager aussi à préférer
les noms scientifiques d'organes, quand il ne
s'agit pas des feuilles ou des racines, par exemple, qui
ont des noms très connus dans toutes les langues.
Les Français et les Anglais ont adopté à peu près ou
complètement les noms latins d'étamine, pistil, iinthère,
stigmate, stomate, etc. L'anglais, qui n'est pas considéré
comme une langue latine, les a conservés plus
exactement que le français [ s t a m e n , s t i g m a , s t o m a ) .
M. Asa Grciy approuve avec raison cette fidélité (i),
qui rend facile la lecture des phrases latines de descriptions
aux Anglais et aux Américains.
Les Allemands n'ont pas suivi cet exemple. Ils ont
traduit dans leur langue beaucoup de mots qui auraient
pu servir tels quels, et ils l'ont fait quelquefois d'une
manière malheureuse. Ainsi le mot A n t h e r , qui se
(l) Botanical texù-bool, éd. G, p. 360.
DU STYLE DANS LES OUVRAGES DE BOTANIQUE 25 3
trouve çà et là dans les livres allemands du siècle dernier,
est devenu S t a u U e u t e l , quoique Hugo de Mohl
l'ait encore employé en 183G dans un mémoire bien
connu (1). Or, le mot iillemand est plus long, et il aurait
fallu dire P o l l e n l t e u t e l , car le pollen est autre chose que
de la poussière. On aurait pu dire en P o l l e n h o x ,
en français h o U e - à - j J o l I e n ; m - à h personne n'y a songé,
et c'est heureux. Stoma est devenu en allemand t S ' p a l -
t o l f n u n g , mot plus long et moins exact, puisque le
propre des stomates est d'être tantôt ouverts et tantôt
fermés, exactement comme une bouche [ s t o m a ) . S j ) a l t o l J -
n w i g s'appliquerait mieux à des pores toujours béants.
J'ignore si les Russes, les Hongrois, etc., ont imaginé
dans leurs langues des mots spéciaux do botanique.
Ce serait une complication ajoutée aux difficultés
d'isolement, dont ils sont les premières victimes.
Chaque langue fait ressortir des mérites ou des démérites,
qui lui sont propres, en raison de sa nature môme
ou du caractère de ceux qui la parlent:
En français l'ordre dos mots est tellement déterminé ;
il fixe tellement le sens de la phrase, qu'on est un
peu forcé d'être clair. Cependant la multitude de nos
mots à plusieurs sens, qui ravit les amateurs do calembours,
et la monotonie des e muets et des nasales
gênent beaucoup l'écrivain. Il est obligé aussi de relire
et de ruser pour ne pas répéter les mêmes mots dans
des lignes rapprochées. C'est une difliculté extrême dans
les sciences, ¿ittendu que pour chaque forme, chaque
organe ou chaque idée, il n'y a qu'un seul terme
exact. Ajoutez à cela un public extrêmement littéraire,
passionné des discours et du théâtre, habitué
(1) Beobachtungen über die Umwandlung von Antheren in Carpelle,
in-8"^. Tubingne.
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