peine caché par quelques pouces de terre.
Afin de mettre nu sol si ingrat, en apparence
, en état de produire , cës hommes
laborieux creusent le rocher , et ils le brisent.
Les morceaux les plus voisins de la
surface et que le contact de l’air a durcis ,
servent à faire , autour du champ, un mur
à sec, qui, en même-temps qu’il le débarrasse
de pierres trop Solides pour se décomposer,
empêche que les eaux des pluies
n’entraînent la terre végétale. Une partie
du rocher est réduite, à force de travail,
en petites parties, et l’on y mêle une couche
mince de terreau , que l’on va quelquefois
chercher: jusqu’en Sicile. Ce mélange
est trèsrfertile. L ’on y cultive les plantes
cerealës, le millet , le coton annuel (i).-
Les figuiers, et d’autres arbres fruitiers, y
croissent fort bien ; c’est de là que viennent
ces belles oranges, à pulpe ronge , à
parfum délicieux, si estimées en Europe, b
Mais , il faut en convenir, malgré les
peines et les soin*s des Maltois, leurs campagnes
n’ont rien qui plaise; leur aspect
même est désagréable. Les murailles dont
les possessions très-divisées sont closes, des
( i) Gassypium hcrbaceum. L .
pierres blanches, un terroir jaune et sec,
presque sàns arbres et sans verdure, forment
un tableau d’une grande dureté et qui fatigue
la vue.1 La culture ne prend un aspect riant
que lorsqu’elle est secondée par la nature.
L ’on doit regarder comme un des efforts
les plus püissans de l’industrie maltoise
la formation d’un grand jardin, à laquelle on
travailloit àSt.-Antoine, maison de campagne
du grand-maître , à une demi-lieue de la
ville. C’étoit vraiment une merveille dans
un pays où il est si difficile d’ameublir le
sol : part-tout ailleurs , c’eût été un jardin
fort ordinaire, quoiqu’il fut paré de beaucoup
de flèurs , entr’autres de magnifiques
pavots doubles (r) et de belles-scabieuses (2).
Les allées, couvertes de fragmens de pierres
blanches étoient désagréables pour la marche
et fatigantes pour la vue. Le grand-maître ,
Rohan, nous: donna une fête dans cette
Gampagne. A la ville, personne ne pouvoit
manger avec ce petit souverain, et a Saint-
Antoine,' tout ie monde n’avoit pas le droit
de se placer à sa table. MM- Durfoit et
Tott, comme ayant le grade de colonels,
(1) Papaver rhoeas. Lin.
Scabiosa atro purpurea, Lin.