lieues de la ville , est remarquable par la
beauté de ses plaines, la variété de sa culture,
la fertilité de son terroir , et par les nombreuses
maisons de plaisance dont elle est
ornée. Le chemin qui y conduit est bordé
d’aloès et de raquettes. C’est-là que l’on voit
un monument honteux qu’un prince Pala-
goni a élevé au mauvais goût; il est si révoltant
qu’il ne mérite pas même le nom de folie.
Que l’on s’imagine l’extérieur et les avenues
d’un château surchargé d’un nombre prodigieux
de statues en pierre , grossièrement
taillées , entassées sans ordre, et représentant
des monstres d’une composition si rebutante
qu’ils cessent d’être ridicules. L ’intérieur
est du même genre : les murs des appartenions
sont plaqués de verres peints en faux
marbre ; des morceaux de glace qui réfléchissent
les images en mille sens divers *
forment les plafonds. L ’on y trouve des
grands crucifix, des pyramides faites avec
des tasses , des soucoupes , des cafetières , et
avec une autre espèce de vase qui sembloit
ne devoir jamais être employée en architecture
(i). Toutes ces choses sont arrangées
de manière , qu’elles forment l’assemblage
( i ) Des pots-de-chambre.
le
ïe plus choquant. Dans la chapelle * pâi?
exemple , il y1 a une troupe de jolis anges*
absolument nus , et de la plus belle carnation;
au milieu d’eux est une grande figure
en bois, d’un homme mort et à moitié rongé
parles vers. Elle est malheureusement asse2
bien faite pour , qu’au premier coup-d’oeil *
on la juge naturelle. L ’on m’a raconté que
de plusieurs femmes qui avoient eu la curiosité
de parcourir ce séjour de la plus grotesque
bizarrerie , les unes s’étoient évanouies
, et quelques autres qui étoienf
enceintes , avoient éprouvé les accidens
les plus fâcheux , en portant les yeux sûr
cette figure vraiment horrible , après les
avoir d’abord fixés avec complaisance sur les
belles formes et le brillant coloris des anges»
Le propriétaire de ce château a été interdit,
parce qu’il se ruinoit par l’exécution de ses
idées d’une absurdité inconcevable ; car son
palais de la ville est, dit-on, meublé de la
même manière que sa campagne.
Le château du prince de ValguarnerQ.
est à côté de celui du prince Palagoni , mais
ne lui ressemble pas» Sa construction est
d’un bon goût, comme son ameublement ;
sa situation et la vije sont charmantes ; un
Tome I . D