dans leurs maisons, qu’ils évitent avec soin,
et qu’ils n’osent toucher , sous peine de devenir
eux-mêmes impurs. L ’on peut ainsi
juger de toute la valeur de l’épithètede
chien dont ils accueillent les Européens.
Bien différens en cela , comme en toute
autre chose , des anciens Egyptiens, qui
rendoient un culte particulier et de plus
grands honneurs qu’à tous les autres animaux
, au plus intelligent de tous, et à celui
que ses excellentes qualités rendent le plus
digue de l’homme (1).
Par une de ces contradictions inconcevables
, chez tous autres que les Musulmans
, il y a peu de villes dans le monde
qui aient autant de chiens que celles de
l ’Egypte, ou, du moins, il n’y en a point
qui paroissent en contenir davantage parce
qu’ilsy sont constamment réunis dans les rues,
leur seule habitation. Ils n’y ont d’autre nourriture
que celle qu’ils peuvent ramassçr aux
portes des maisons, ou découvrir en fouillant
dans les immondices. Les femelles déposent
leurs petits dans quelque coin d’une
ruelle écartée , ou peu habitée ; car , un
. (1) Le culle du chien étoit répandu dans l’Egypte
entière.
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sectateur de Mahomet ne les supporteroii
pas près de chez lui. Continuellement en
butte aux coups des passans ; quelquefois massacrés
, sans pitié, par une canaille armee ;
exposés aux intempéries de l’air ; ne trouvant
qu’avec peine de quoi soutenir une
vie souffrante; maigres, décharnés, souvent
rongés par une gale qui dégénère quelquefois
en une espèce de lèpre ; hideux meme par
leur état de délabrement, ces malheureux
animaux inspirent autant deoompassion, que
l’on ressent de mépris et d’indignation pour
les barbares au milieu desquels ils habitent.
Il est sans doute étonnant qu’au milieu
d’une vie de misère et de souffrance , plusieurs
de ces chiens ne soient pas fréquemment
attaqués de l’hydrophobie. Mais cette
maladie, rare dans le nord de la Turquie,
l ’est encore plus dans les parties méridionales
de cet empire , et elle est inconnue sous le
ciel brûlant de l’Egypte. Je n’en ai vu aucun
exemple; et les habitans que j’ai consultés,
n’en avoient pas l’idée. Il paroîtroit néanmoins
que la rage n’a pas toujours, été
étrangère à cette contrée, puisque, selon
les hiéroglyphes d’Orus- Apollon (1) , cités
( 1 ) Lib. I , cap. 38l .