â Palerme (i). II a occupé la moitié d’un
chapitre de son ouvrage, à peindre ou plutôt
a charger le babil et la vanité de cette
femme, et il en a pris occasion d’étendre
sa satire sur les Françoises en général, ce
qui , assurément, n’est ni juste ni galant.
Mais leurs grâces et leur amabilité, auxquelles
on rend généralement un hommage bien
mérité, ne peuvent recevoir d’atteinte de
la mauvaise humeur d’un Anglois. Bridone
n’est pas le seul voyageur de sa nation qui
se soit plu à mal-parler de la nôtre; et, aux
yeux de l’homme impartial, cet esprit de
jalousie et d’orgueil ne paroit pas moins
ridicule que les peiits traits de présoipption
de madame Montagne ( c’est le nom de l’aubergiste).
Je voulus lui demander à dîner,
afin d avoir occasion de lui parler de Bridone,
qui etoitvenu à Palerme peu d’années
avant nous. Elle savoit qu’il avoit écrit
de longues plaisanteries sur son compte-, et
combien son mari et elle étoient maltraités
dans son livre ; mais elle en ignoroit les
détails. Je lui lus le passage qui la concer-
noit. Elle me prouva alors que. Bridone ne
s’etoit pas écarté de la vérité , lorsqu’il la
C1) Tom, 2 j pag. 63 et suiv.
peignit comme une grande parleuse : elle
ne tarissoit pas en me racontant de petites
anecdotes qui l’avoient déterminée à prier
l’Anglois de chercher un autre logement,
et elle me débita, à ce sujet, un chapitre
pour le moins aussi long que celui du
voyageur.
Les églises de Palerme, comme presque
toutes celles de l’Italie, sont décorées avec
magnificence. Quelques-unes, celle des jésuites,
par exemple, sont tellement surchargées
d’ornemens et de richesses, que
le bon goût en souffre^Mais, outre les belles
peintures dont l’intérieur de la plupart de
ces édifices est orné, l’on admire particulièrement
le superbe autel de l’église de Sainte-
Catherïne, construit du marbré le plus beau,
et qui, par un accident singulier, forme,
autour de l’autel, une large bordure en festons
; dans la cathédrale , les quatre - vingts
colonnes de granit oriental qui la soutiennent
, des tombeaux de porphire .et un immense
tabernacle de lapis-Iazuli. Un prêtre,
après avoir tiré successivement et avec
beaucoup de mystère, quatre à cinq rideaux ,
me montra un grand crucifix en bois qu’il
m’assuroit sérieusement avoir été commencé