aes caresses que ces hommes froids et orgueilleux
ne daignent pas accorder à des
êtres infiniment plus sensibles. Enfin, à moins
de les déifier, comme du temps des anciens,
ils ne peuvent pas mieux être traités.
Il est vrai que les chats y sont très-
doux et très - familiers. Ils n’ont point
la défiance , le caractère farouche qui en
font, dans quelques parties de la France,
une race d’animaux plus sauvages que domestiques.
Mais', ces différences sont autant
l’ouvrage_de l’homme que l’effet de l’influence
des climats. Dans le département
que j’habite, et dans ceux qui l’avoisinent,
le chat, principalement dans les campagnes,
est l’être le plus malheureux , après les chevaux
consacrés à la culture. Maîtres et va^
lets s’accordent à le chasser, à le battre, à
lui jeter des pierres , à le faire harceler par
les chiens, et à lui refuser la subsistance.
Si la faim, que son état de maigreur atteste,
le porte à guetter le moment de dérober
^quelque morceau,le prétendu voleur, parce
que la nature .s’est opposé à ce qu’il se
laissât mourir d’inanition, paie de sa vie
l’adresse qu’il avoit mise à la soutenir. Comment
les chats ne prendroient-ils pas, chez
de
3e pàreiïs hôfes, dont la dureté envers les
animaux approche de la barbarie, une physionomie
sauvage , une empreinte de férocité
? Et si l’on compare ces chats si misérables
de mon pays à ceux que l’on nourrit
a Paris, où, mieux traités et à l’abri de
craintes perpétuelles, ils sont d’une aimable
familiarité, l’on aura une nouvelle preuve
de ce que peut le caractère de l’homme sur
celui des animaux qui l’entourent.
J’ai possédé long-temps une superbe chatte
d’Angora (i). Des poils longs et soyeuxja
couvroient entièrement; sa queue bien fournie
, ibrmoit un beau panache que l’animai
relevoit à volonté au-dessus de son corps.
Aucune tache,0 aucune ombre ne ternissoit
le blanc éblouissant de sa robe. Son nez , le
tour de ses lèvres étoient d’une couleur de
( i) L ’habitude de parler des chats dlAngola poux
Angora , n’est pas encore passée. On la trouve même
dans des ouvrages modernes de sciences. Ouvrez l’Encyclopédie
méthodique , à l’article Kakatoès, et voua
verrez qu’un de ces oiseaux à huppe jaune , se plaisoit
à jouer avec un chat d’Angola. Angola est sur la côte
occidentale de l’Afrique, et Angora dans l’Asie mineure
, non loin de Smyrne. C’est-là que l’on trouve les
animaux, à longs poils, dont on fabrique ■ de si beaux
ç amelots.
Tome I , X