lis ch 3 ou canal du Caire. Elle répondoit
aux signes du franeois, et bès pourparlers silencieux
se répétoient plusieurs fois le jôùr ^
à des heures convenues. Je ne manquai pas
d’y assister sans être vu de la dame. J’appris
l’art des signaux qui, dans un pays où il est
impossible de parler aux femmes, est un
langage fort expressif, et je'fus bientôt en
état de devenir moi-même un assez bon télégraphe.
Le jeune homme, obligé-de partir
du Caire avec le Consul, avoit fait ses adieux.'
Resté seul dans la maison, je me présentai
pour le remplacer; je fis entendre que,
françois comme lu i, je venois exprimer les
mêmes sentimens, offrir les ; mêmes hommages.
Bientôt ennuyé de n’a ppérce voir que
par les jours étroits d’une grille épaisse, ét
de ne porter mes voeux qu’à une beauté ,'
peut-être imaginaire, je demandai que l’on
se produisît au grand jour. L ’on fit des difficultés
; j’insistai, et l’on nie promit que vers le
soir,onmonter'oitsurla terrasse delà maison.
Je me rendis sur la mienne , et je vis arriver ,
toujours à soixante pieds de distance , une1
femme élégamment vêtue ; mais elle portoit
son voile. C’étoit encore pis que les losanges
du treillis de sa croisée, par lesquelles je
t'oyois du moins une figure entrecoupée.
Je priai delà manière la plus pressante, que
ce voile importun disparût. Une esclave
noire, qui accompagnoit sa maîtresse, joignait
ses exhortations à mes prières : tout
fut inutile. C’est pour ces femmes la dernière
des faveurs, que de montrer leur figure ; et
par une étrange modestie , elles laisseroient
voir leur, corps entier, plutôt que de découvrir
leur visage. Le lendemain , je renouvelai
les mêmes sollicitations, et elles eurent
du succès. Après beaucoup de difficultés ,>
l’officieuse négresse , qui avoit le secret de
sa maîtresse , arracha le voile, et je vis une
jeune et jolie femme. L ’incarnat de la pudeur
répandoit sur son visage un coloris très-vif,
il s’adoucit par degré, et il ne resta plus que
les roses de la beauté. Dès ce moment, la
plus grande liberté régna dans nos entretiens
muets. J’avois reçu la plus haute marque de
bienveillance. Ma belle voisine m’informa
que son mari/, qui étoit un vieux marchand
Turc, alloit au loin pour quelque temps, et
elle m’engagea à nous entendre de plus près ,
en me rendant chez elle. Elle me désignoit
une petite porte donnant sur le canal , et
que l’on n’ouvroit que pour y puiser de