Près de deux cents coups de fusil furent tirés
sur les aigrettes ; mais heureusement pour
elles , les tireurs étoient aussi mal-adroits
qu’ignorans en histoire naturelle ; et deux ou
trois de ces oiseaux seulement tombèrent
victimes de la haute opinion que l’on avoifc
conçue de' leur espèce. La fusillade n’eût
pas finie de si tô t , et nous eussions , vraisemblablement,
mis huit jours à arriver au
Caire, à cause des nombreux zig-zags que
nos chasseurs nous faisoient parcourir, et
des pauses fréquentes dont ils interrom -
poient notre navigation , si le chirurgien ,
transporté par un enthousiasme ornithologique
, ne se fut laissé tomber dans la cale
du bateau , précisément au milieu d’une
marmite de lentille| , qui cuisoient pour
l’équiqage. Cette catastrophe, fut le signal
de la paix avec les prétendus ibis, et nous
pûmes.continuer notre route, sans autre inconvénient
que l’ennui d’entendre des exclamations
sur l’importance d’une prétendue découverte,
qui avoit failli coûter cher au chirurgien.
Je trouvai dans un endroit aquatique et
couvert de roseaux , une foulque (i) ou mo-
( i ) Foulque. Buffon , Hist. nat. des Ois. et pl.
enlum. n?. 197. — Fúlica afra. L .
( 377 )
relie, en Egypte hoor. J’ai eu depuis occasion
de me procurer plusieurs de ces oiseaux, et
en les comparant avec la description que Buf-
fon en a donnée, j’y ai remarqué quelques différences
de teintes sur le plumage. La plus sensible
de ces différences est sur la portion de la
jambe nue au-dessus du genou, laquelle est,
suivant Buffon , cerclée de rouge , au lieu
que ce cercle étoit jaune dans les foulques
que j’ai vues. Ces oiseaux sont gras, en général
, et ils ont la chair tendre et de bon goût.
Je rencontrai aussi une caille que je tuai.
Il n’est pas ordinaire d’en voir à cette époque:
celle-ci étoit seule dans le canton que' je parcourus.
C’est au mois de septembre que le
passage des cailles a lieu sur les côtes de l’Egypte
; elles se rassemblent alors, plus particulièrement
dans l’île sablonneuse qui partage
l’embouchure du N il, près de Rossette.
Mais j’aurai occasion de revenir sur le passage
, vraiment étonnant, de ces oiseaux.
Les champs qui venoient d’être dépouillés
de la récolte du riz , étoient remplis de bécassines
( 1 ). Elles y sont singulièrement
nombreuses. Un chasseur de Rossette nous
(*1 Bécassine. BufFon, Hist. nat. des Ois. et pl.
enlum. n°. 883. — Scolopax ga/linago. L .