
soient quelquefois assez hardis pour attaquer l’homme sur ia terre
et en plein jour; mais il faut dire aussi que le plus souvent ils fuient
à l’aspect de cet être supérieur et n’attendent pas ses coups. C’est
du moins ce que rapportent plusieurs voyageurs, et ce que nous
avons constaté à Timor, lorsque, dans les marais de Babao, nous
fîmes une chasse à ces reptiles, qui y sont en grand nombre. Conduits
par un Timorien à la vue perçante, qu’un des chefs de cette
colonie hollandaise, M. J. M. Tielman, nous avoit donné pour
guide , nous en vîmes trois ; et malgré toutes nos précautions pour
en approcher de très-près, afin de les tirer avec la certitude de
les atteindre, nous ne pûmes y réussir : ces monstres amphibies
senfuirent du plus loin qu’ils nous aperçurent, en regagnant la
mer, sur les bords de laquelle ils se trouvoient. Voilà un fait dont
fut témoin une partie de notre état-major. Cependant nous devons
ajouter que les crocodiles se montrent assez fréquemment dans la
rivière de Coupang, qu’ils viennent ordinairement de nuit sur le
rivage, à la marée montante, et que, dans l’espace de cinq ans,
nous a-t-on dit, cinq personnes avoient eu le malheur d’étre dévorées
par ces monstrueux reptiles, que quelques naturels ont encore
en vénération. Nous trouvâmes, dans les marais de Babao, la téte
osseuse d’un crocodile de l’espèce à deux arêtes [ crocodilus bipor-
catns\, que nous avons déposée dans les galeries d’anatomie comparée
du Muséum.
Les timides lézards nous ont par-tout offert leurs nombreuses
tribus, si l’on en excepte les îles Malouines. Nous nous rappelons
tous qu’à Timor nous étions quelquefois éveillés par le cri singulièrement
aspiré du gros gecko à gouttelettes, dont la couleur est
fauve et le regard affreux.
Diverses espèces de ces reptiles abondent aux îles Mariannes,et,
pour mieux dire, par-tout entre les tropiques- Aux Sandwich,
cependant, iis sont en petit nombre. Le peuple les a en horreur.
Sur l’île de Wahou, l’un de nous, revenant un jour chargé de collections,
avoit fixé sur son chapeau, avec une grosse épingle, un
petit scinque à deux raies ; à cette vue, trois ou quatre cents insulaires,
assemblés auprès des jeux, les quittèrent pour l’entourer en
témoignant leur étonnement. Il n’étoit point gêné dans sa marche,
car il lui suffisoit d’avancer rapidement sur eux, pour que l’approcJie
de l’animal qu’il portoit les fît reculer avec précipitation. Toutefois
nous vîmes un de ces hommes qui avoit osé se faire tatouer sur les
joues des figures de lézards; aussi le montroit-on avec des gestes
où se peignoit l’effroi qu’inspirent ces reptiles, qui du reste sont
aussi innocens là qu’ailleurs.