
gentil tamarin. Je sajou, et, dans les régions plus inférieures et
plus chaudes, le doré marikina. Nous y avons aussi entendu, sur
le soir, les effroyables hurlemens de l’aJouate : renvoyés et augmentés
par les échos, ils épouvanteroient le voyageur le plus
intrépide qui ne connoîtroit pas l’animai qui les produit “. Voilà
pour les mammifères et les oiseaux, ceux de mer exceptés, sur
lesquels nous reviendrons ailleurs, les remarques principales que
nous ayons été a portée de faire au Brésil. Mais nous ne laisserons
point l’Amérique, sans parler des rives de la Plata.
S i, du vingt-troisième parallèle Sud on s’avance vers le trente-
sixième , la scène change au point qu’il semble que ce n’est plus
le même continent; et après la traversée qui sépare le nouveau
monde de l’Afrique, les regards ne sont pas frappés par une plus
grande métamorphose.
Aux alpes du Brésil on voit succéder, de chaque côté du grand
fleuve, un sol aplati; aux vastes forêts et à leurs gigantesques végétaux,
d immenses plaines verdoyantes, couvertes de graminées; aux
fréquens coups de tonnerre des montagnes des Orgues, ces vents
furieux venant du pôle, nomméspamperos, qui rendent la navigation
si dangereuse.
Dans quelques endroits de cette terre d’alluvion percent des
monticules de granit et de schiste, seuls indices qui rappellent
• C ’est dans ces mêmes lieux que nous nous procurâmes le myrmecophaga tamandua dont
le squelette a servi aux observations de M. C u v ie r pour son ouvrage sur les ossemens fossiles.
C e fourmilier, que les Brésiliens nomment tamandua mirin i, a été pris dans la colonie
suisse, quarante lieues de R io de Jan eiro. Sa peau est excessivement dure. V oic i quelques
détails d organisation recueillis à la hâte : le fo ie , volumineux, avoit cinq lobes; sa vésicule étoit
tres-grosse; la rate fort longue, granuleuse, rougeâtre et frangée; le pancréas avoit plus de
S IX pouces de longu eur; l’oesophage s’ inséroit au milieu de l’estomac, lequel étoit à demi-
plein de fourmis de la petite espèce ; le pylore fort gros et renflé ; les intestins grêle s, depuis
cette ouverture jusqu’au co lon , étoient longs de sept p ied s, et le colon, à lui s eu l, me-
suroit huit pouces ; il présentoit des stries sur sa longueur. D e u x capsules surmontoient les
reins ; les testicules, placés dans l’intérieur du ventre , étoient ronds et assez gros.
Un paquet de glandes, plus gros que la moitié du p o in g , occupoit la partie antérieure
du sternum , en s’étendant de chaque côté du cou. C e sont ces glandes qui sécrètent le suc
visqueux qui enduit la langue longue, rétractile et charnue de cet animal.
au voyageur qu’il n’a point encore quitté le sol de l’Amérique.
Djmmenses troupeaux de boeufs, de mulets, de chevaux, errent
dans ces solitudes herbeuses. Ces derniers sur-tout ne connoissent
de limites vers le Sud que le détroit de Magellan, où ils aident
aux migrations du Patagón. Des bandes de tigres, de chiens sauvages
, accompagnent ces troupeaux, et trouvent toujours à leur
suite une proie facile; comme, en Afrique, les lions et les tigres
poursuivent les gazelles voyageuses : mais si le cheval et le boeuf
paisibles craignent le jaguar, celui-ci redoute l’homme, qui, pour
avoir son élégante fourrure, le poursuit sans relâche, l’atteint d’un
plomb mortel, ou bien l’enlace quelquefois avec adresse.
Ces grands animaux parcourent presque seuls les plaines de
Montévidéo et de Buénos-ayres ; et les petites espèces semblent
s’étre retirées pour leur faire place. Ain si, l’ancien continent a
fourni à cette partie du nouveau ces grands types qu’il avoit
perdus et dont on retrouve les ossemens fossiles enfouis dans des
débris d’alluvion auprès de la ville de Montévidéo.
Si ce n’étoit pas nous écarter de notre sujet, nous chercherions
à décrire les moeurs des peuples de ces contrées, issus du mélange
des Européens avec la race indigène, et menant une vie à demi
sauvage à la suite des troupeaux; nous ferions voir qu’ils sont à
ces déserts verdoyans ce qu’est l’Arabe aux sables brûlans d’Afrique,
indomptés comme lui, cruels et hospitaliers tout-à-la-fois : toujours
à cheval, ils franchissent dans un jour des espaces considérables,
avec cette différence que le noble animal, compagnon de fortune
du Bédouin, n’est rien pour le barbare Galwuchc, qui dans un instant
le force, l’excède et l’abandonne pour en prendre un autre. Ce
ne sera point en Amérique que se renouvellera la scène touchante
de l’Arabe pleurant sur le corps du cheval expirant qui vient de
lui sauver la vie “.
Les espèces d’oiseaux les plus remarquables de ces contrées sont
‘ Châteaubriant, itinéraire.