
lieux que les tlielphuses ont choisis pour leur domicile, et que
des myriades de gélasimes, dont les couleurs sont en harmonie
avec leurs habitudes, ont criblés de trous. Dès qu’on vient à troubler
la solitude de ces derniers, on les voit s’ériger sur leurs pattes
et menacer avec leur plus grosse pince qu’ils lèvent en l’air. Ils ne
fuient vers leurs retraites que lorsqu’ils sont sur le point d’étre pris,
tandis que les craintifs tourlourous se tiennent à l’entrée de leur
terrier et y rentrent au moindre danger. Il est assez curieux de leur
voir creuser leur profonde et dégoûtante demeure ; ils en sortent
tout couverts d’une boue noire qu’ils portent à l’aide de leurs pinces
et qu’ils vont entasser à quelque distance. Si la terre qu’habitent ces
animaux ne contient pas de substance nutritive, nous ne savons ce
qui peut fournir un aliment à un aussi grand nombre d’individus
qui ne paroissent jamais abandonner leur stérile contrée.
Si nous dirigeons nos observations sur les bords de la mer du
même pays, indépendamment des espèces connues, nous en verrons
d’autres fuirla lumière et vivre constamment sous les sables humides ;
ce sont les hippes, dont le tét est ovalaire, presque cylindrique.
Tous les jours on voit les pêcheurs venir remuer les sables avec
les mains, et enlever ces crustacés,dont ils font des appâts. Les por-
tunes et les maïas ne quittent pas le fond des eaux. Lorsque, à notre
départ du Brésil, nous retirâmes nos ancres, nous trouvâmes sur les
câbles un grand nombre de ces derniers, de même que des millions
de nymphons, que leurs longues pattes déliées et fixées sur un
corps très-mince, feroient prendre pour des faucheurs marins.
Par-tout où les côtes découpées en baies ont des eaux peu profondes,
les espèces de crustacés sont nombreuses; comme à l’île de
France, aux Mariannes, aux îles des Papous, à la baie des Chiens-
Marins, &c.; mais quand les rochers sont abruptes, battus par la
tempête, et que les plages manquent, les grandes espèces seules sy
rencontrent en petit nombre ; c’est ce que nous avons pareillement
remarqué à i’île Bourbon, au Port-Jackson, aux îles Sandwich. Dans
ce dernier lieu, on prit à la ligne, par quatorze brasses de profondeur,
un gros ranine de couleur rouge, dont les pieds, à l’exception des
serres, de forme aplatie et propre à la natation, indiquent un séjour
habituel dans l’eau. Il nous paroît que c’est tout-à-fait à tort que
des voyageurs ont dit que cet animal quitte la mer pour aller
jusqu’au sommet des arbres les plus élevés.
Les hermites ou pagures sont ceux que nous avons trouvés le
plus fréquemment : il n’existe peut-être aucun lieu où on ne les
rencontre ; mais les Mariannes, les îles des Papous et Timor,
nous en ont offert en plus grand nombre. Les grèves de la petite
île Kéra, dans la baie de Coupang, en sont couvertes.’ A l’instant
de la plus forte chaleur, ils cherchent l’ombre sous des touffes
d’arbrisseaux; et, lorsque la fraîcheur du soir se fait sentir, on
les voit sortir par milliers, roulant leur coquille, se heurtant,
trébuchant, et faisant entendre par leur choc un petit bruit qui
les annonce avant qu’on les aperçoive. Toutes les coquilles uni-
valves leur sont bonnes, comme on sait; cependant la plupart
étoient logés dans des nérites marines, qui, très-communes dans
les lieux où nous avons fait cette remarque, ne sont pas les
coquilles ies plus favorables au développement de ces animaux
parasites.
Quand ils aperçoivent quelque danger, ils se sauvent en toute
hâte, soit dans des trous qu’ils rencontrent et qu’ils ne creusent pas,
soit préférablement sous les racines ou dans les troncs pourris des
vieux arbres; rarement dans la mer, quelque près qu’ils en soient.
Cette observation que nous avons faite bien souvent, prouve qu’il
existe deux familles distinctes de ces animaux; celle qui habite dans
les eaux, et celle qui n’y va jamais, ou du moins que très-rarement.
Ce n’est pas que les individus de toutes deux ne puissent vivre plus
ou moins de temps hors de l’élément qui leur est naturel, c’est-à-
dire, les uns dans l’air et les autres dans l’eau; ils en ont la faculté,
comme nous nous en sommes assurés; mais le temps nous a manqué