
leur propre poids, et saisissent le poisson sans plonger, comme les
liirondeiles et les martins-pêcheurs.
Les hirondelles marines parcourent l’Océan en petites troupes,
comme ies phaétons. On les reconnoît à leur vol oblique, irrégulier,
en zig-zag, à leurs grandes ailes triangulaires pointues, et
au peu de saillie de leur tête. Plusieurs espèces joignent à cela
une queue fourchue. L a plupart font entendre par intervalles des
cris aigres. Ordinairement elles ne suivent ni n’entourent les vaisseaux,
et ne font que passer.
On ne peut rien présager de la présence de quelques-uns de
ces oiseaux vagabonds. Il n’en est pas de même lorsqu’ils appa-
roissent en grand nombre : réunis aux fous, ils nous annoncèrent
dans le grand Océan l’île sablonneuse de Christmas, quoique nous
en fussions assez éloignés. Dans les belles mers équatoriales, les
hirondelles voyagent quelquefois la nuit ; car nous les entendions
pousser des cris perçans.
Les îles et les côtes désertes en recèlent des milliers qui vivent
en troupes. La baie des Chiens-Marins est le lieu qui nous en offrit
le plus à-la-fois. Ces hirondelles indiquent, ainsi que plusieurs
autres espèces aquatiques, des plages poissonneuses : cependant,
vu leur grand nombre, elles sont exposées à de longues abstinences,
sur-tout lorsque la mer est orageuse, ce qui n’est point pour elles,
comme pour les pétrels, un instant favorable à la pêche; elles demeurent
alors entassées en troupes sur le rivage.
Une espèce assez rare est la petite hirondelle toute blanche,
dont les plumes sont soyeuses et satinées comme celles des paille-
en-queues. Sparmann l’a figurée. Elle habite ie Cap de Bonne-Espérance,
les environs de l’île Christmas et les Mariannes : nous
l’avons fréquemment observée à Cuam. Elle pêche sur le rivage,
et va se reposer sur ies arbres ; mais les pieds palmés de cet oiseau
sont si courts, qu’il a beaucoup de peine à s’y percher. Sa peau et
le duvet qui la recouvre sont d’un noir foncé, de même que le
bec, dont la forme ne nous a pas paru être absolument la même
que dans les autres hirondelles.
Il nous reste à parler des cormorans, des manchots, et de quel
ques autres palmipèdes qui, s’éloignant très-peu de terre, vivent
dans les baies paisibles.
Pour cela, nous nous placerons aux îles Malouines, où, de toutes
les parties de l’hémisphère austral, viennent se réunir des myriades
de ces oiseaux. Nous y verrons les stupides cormorans couvrir de
leurs essaims tous les rochers qui se projettent dans la-mer. Nous
les abattions à coups de fusil ou en leur lançant des pierres, sans
que notre présence, ni le bruit, ni la vue de leurs compagnons
blessés qui se débattoient, fussent capables de Jes inciter à fuir avec
plus de hâte. Il est vrai que leurs petites ailes disproportionnées avec
leur lourde masse, sont un obstacle physique à ce qu’ils puissent
s’envoler facilement : s’élancer dans l’air est pour eux un travail
pénible qu’ils n’exécutent que lorsqu’ils y sont forcés ; alors on les
voit étendre le cou, déployer leur queue, battre long-temps avec
effort la surface de la mer, avant de pouvoir s’élever.- L a surprise,
l’effroi, leur font rendre le poisson dont leur ample estomac est
rempli.
Il règne beaucoup d’incertitude relativement aux diverses espèces
de ces oiseaux, dont le plumage varie selon J’âge, le sexe, les localités,
et peut-être les saisons. Par exemple, parmi les innombrables
bandes qui habitent le Cap de Bonne-Espérance, on peut en
reconnoître une espèce unique et très-distincte dans le carbo
cristatus, dont la couleur paroît demeurer constamment brune.
Il n’en est pas ainsi de ceux de la baie des Chiens-Marins, du
cap Horn et des àâalouines, qui nous semblent ne former qu’une
seule et même espèce, si variable, il est vrai, par la multiplicité des
nuances, qu’on ne sait pas au juste quelle est celle qui lui est la
plus ordinaire et qu’elle conserve après toute sa croissance. Voici
ce que nous avons observé.
Voyage de l ’Uranie. — Zoologie.