
ment échancrée à Ja pointe sans être rétractile, ce qui fait qu’ils ne
se nourrissent point de sucs, mais encore par leurs moeurs heaucoup
plus vagabondes, si l’on peut se servir de cette expression,
que celles des philédons proprement dits; car ces derniers, comme
tous les oiseaux qui sont ainsi organisés, demeurent par nécessité
fixés à certaines espèces de végétaux, dont ils ne peuvent s’éloigner
sans courir ie risque de périr.
Il seroit curieux de rechercher si, ayant constamment la tête
plongée dans les corolles des fleurs, le sens de la vue chez eux
est moins parfait. Tout ce que nous savons, c’est qu’en général
ils se laissent approcher de fort près.
S E C T I O N V I I .
Iles Malouïnes.
L e s Malouines, sur lesquelles nous fîmes naufrage et qui manquèrent
devenir notre tombeau, sont le dernier point qui doit
nous occuper sous le rapport des oiseaux terrestres proprement
dits. Nous n’avons rien à dire des mammifères; car, à l’exception
du chien antarctique, seul quadrupède appartenant d’une manière
spéciale à ces îles, et dont nous n’avons fait qu’entrevoir un individu,
qui, vu l’état de détresse dans lequel nous étions, fut aussitôt
mangé que tué, tous les autres, comme boeufs, chevaux, lapins,
cochons, y ont été apportés par les Français ou les Espagnols qui,
à diverses reprises, tentèrent d’habiter une terre qui ne paroît
propre qu’aux herbivores ou aux phoques amphibies.
Si l’on considère le peu de profondeur de la mer entre les
Malouines, placées à-peu-près vis-à-vis le détroit de Magellan, et
l’Amérique , on sera naturellement porté à croire que jadis elles
firent partie de ce continent. L a surface de ces îles offre des
montagnes de grès et des terrains Las et unis ; le so i, dans les premières
de ces localités, est nu, aride, de couleur grisâtre, dépourvu
de végétation; dans les secondes, il est tourbeux, couvert de graminées,
et découpé en criques salées, ou parsemé d’étangs d’eau
douce. Des brumes épaisses et continuelles répandent une teinte
sombre et mélancolique sur ces plages désertes, où l’on ne trouve
pas un arbre : leur ressemblance est parfaite sous ce rapport avec
les vastes pampas de Rio de la Plata. Seulement on voit de loin
à loin, sur leb o rd de la mer, de foibles arbrisseaux clairsemés
et rabougris, du genre empetmm, qui portent des baies dont se
nourrissent plusieurs petites espèces de chardonnerets et de passereaux,
une grosse ¿àive et l’étourneau à poitrine rouge. Ces deux
derniers paroissent au commencement de l’hiver, lors de la maturité
de ces fruits.
L e dactylis aggloméré, roseau flexible de plus de six pieds de
h au t, couvre les petites îles de la haie Française, et sert de refuge
à un merle noir cfue nous avons aussi trouvé au cap H o rn , et
à des légions de manchots, comme nous le dirons ailleurs.
Plusieurs variétés de caracaras [ falco Novæ-Zelaiidioe^, diverses
espèces de busards, dont nous donnons des figures, et le percnoptère
aura, habitent ces solitudes.
Les plus audacieux de ces oiseaux de proie sont les caracaras.
Nous en avons vu passer à nous toucher de l’aile, sur-tout lorsque
nous portions quelque pièce de gibier. Après avoir abattu une
oie, l’abandonnoit-on un instant pour en poursuivre d’autres; au
retour, on la trouvoit dévorée par ces animaux; et pour nous
soustraire à leur rapacité, il fallut prendre le parti d’enterrer les
produits de notre citasse. Dans le camp même, ils venoient
enlever les restes de nos repas. Cependant ils paroissoient vivre
en paix avec les petites espèces timides, et jamais nous n’avons
vu qu’ils les poursuivissent.
Enfin, après que nous eûmes détruit ou fait fuir les oies, nous
nous rabattîmes sur ces larrons eux-mêmes, dont nous trouvâmes
la chair excellente. Si jusque-là nous ne nous en étions pas nourris,
Voyage de l ’ Uranie. — Zoologie.