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32 VOYAGE AUTOUR DU MONDE,
faire à des navigateurs, dont la mission se borne à explorer une
partie des côtes ! L ’île de Vaigiou a plus de quatre-vingts lieues de
circonférence, et l’on nous donna à entendre que, dans l’intérieur,
se trouvoit une nombreuse population rassemblée dans une sorte
de grande ville.
S E C T I O N IV.
Iles Mariannes.
L a i s s a n i cette terre équatoriale, et continuant notre navigation
vers le n ord, nous arrivâmes aux Mariannes, où la quantité
de malades que nous avions alors nous força de séjourner longtemps;
de sorte que nous eûmes le loisir de connoître les productions
zoologiques de l’île Guam, la plus grande de toutes, et
qui en est en même temps la capitale.
Cette île n’a que quarante lieues de tour. Son sol est élevé,
montueux, en partie volcanique et en partie formé de calcaire
madréporique. Les montagnes, qui ont toutes subi l’action du feu,
sont arides et peu boisées. Les forêts recouvrent le calcaire et
forment une demi-ceinture à l’île, en avoisinant les bords de la
mer. L a végétation naturelle, peu brillante, se ressent de l’influence
du sol sur lequel elle se développe; tandis que les cocotiers
et les arbres à pain, produits de la végétation artificielle, et placés
dans un terrain convenable, joignent la magnificence à l’utilité.
Cet archipel n’a qu’un mammifère qui ne lui ait pas été apporté
; c est la roussette Kéraudren, dont les nombreuses troupes
n occasionnent point de dégâts, parce que les insulaires ne cultivent
presque pas d’arbres à fruits.
Nous avouons que nous fûmes étrangement surpris, lorsque,
étant, avec M. Bérard, sur la petite île aux Co cos, nous vîmes ces
animaux, bravant l’éclat du soleil, voler en plein jour. Jusqu’à
cet instant nous avions cru que, fuyant la lumière, ils ne sor-
toient que pendant les ténèbres h Ils planent à la manière des
oiseaux de proie , et s’accrochent, dans le repos, aux arbres ou
bien sur les rochers. Les Mariannais en mangent la chair, malgré
l’odeur désagréable qu’elle exhale.
Une petite espèce de cerf axis, qui a été apportée des Philippines,
a tellement multiplié, que l’on ne connoît pas de lieu qui
en contienne proportionnellement davantage; car il existe à Guam
plus de mille de ces animaux. On nourrit de leur chair les équipages
des navires qui touchent à cette île , et le nôtre n’eut presque
pas d’autres vivres pendant le temps que nous y demeurâmes.
Cela n’empêchoit point que les habitans n’en fissent, de leur côté,
une assez grande consommation.
Ce cerf a le bois peu développé ; son pelage est noirâtre et
rude. L e faon est fau v e , et n’a point de taches comme celui
d’Europe, à quelque âge qu’on le prenne. Les femelles doivent
mettre bas vers la fin de mars, puisque, dans les premiers jours
d’a v r il, on nous apportoit fréquemment de jeunes cerfs.
L ’habitude qu’ont ces animaux de se jeter dans la mer lorsqu’ils
sont poursuivis, nous donna occasion de remarquer avec quelle
vîtesse et quelle force extraordinaires ils nagent, ayant tout le
cou, jusqu’au poitrail, hors de l’eau. Leur frayeur est si grande,
qu’ils s’élancent quelquefois dans les hrisans qui déferlent sur eux
avec fureur. Dans les bois, ces pauvres bêtes sont sans cesse dévorées
par des légions d’insectes, qui, déposant leurs larves sur leur
peau, la couvrent d’ulcères dégoûtans'’.
^ M. Sa it a vu aussi, à M ah a v illy , dans le M y so re , des chauve-souris de quatre pieds
d’envergure, voler en plein jour. ( Voyage de V a len tìa , tom. II , pag. 139 . )
^ M. C u v ie r décrit le crâne et le bois de cette espèce de c e r f, dans ses Ossemens fossiles.
V oic i ce qu’il en dit :
« Les bois des figures 39 et 40 viennent des M a rianne s, dont ils ont été rapportés par
3>MM. Quoy et Gaimard. Us sont trè s-gros, très-rudes et de couleur cendrée , et l’on y
3> remarque, dans l’aisseile du maître and ou ille r, une petite excroissance qui manque aux
espèces voisines. Ce lui de la fig. 39 tient à un crâne qui ne paroît jamais avoir eu de
Voyage de rUranie. — Zoologie. j
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