litieiU habitués à aimer, de ce qu’ils appelaient un abandon
; comme si en les laissant libres d’agir à leur gré,
on les avait forcés à s’éloigner de la famille, dont ils
faisaient réellement partie.
Mais si, dans «pielques colonies et surtout chez quelques
colons bous et bumaiiis, le nègre a pu oublier, ou
même chérir son esclavage, il ne paraît pas qu’il en
soit ainsi au Brésil.
La, C C S hommes, qu on achète au marché comme des
bêtes de somme, ne sont pas traités autrement que le
cheval ou le mulet vendu à côté d’eux. Le maître les
exploite de toutes les façons : portefaix, artisans, conducteurs
de bateaux, chacun doit rapporter un profit
proportionné a ce qu’il a coûté; et lorsque, obéissant aux
plus chères lois de la nature, il donne le jour à des
enfants, comme lui voués à l’esclavage, ce n’est encore
pour le maître qu’un profit nouveau.
L es n è g re s c o u ch icteu rs d e b a te a u x .
Les conducteurs de bateaux semblent de lous les
plus malheureux. Comme on ne saurait les surveiller
constamment, il a fallu s’assurer de leur travail en les
taxant d avance. La somme qu’ils doivent rapporter tous
les soirs est fixée. La journée a-t-elle été mauvaise et le
gain inférieur au taux exigé ? ils sont battus. Pourront-
ils du moins garder l ’excédant, si le gain recueilli est
par hasard supérieur à la taxe, et balancer ainsi les mauvais
jours? N(5n vraiment; le maître profite el garde
le tout. Faut-il s’étonner que parfois la pensée du crime
se glisse dans leur esprit irrité par l ’infortune et l’injustice,
quand le fruit du crime peut les préserver d’un
châtiment prévu? Aussi recommande-t-on de se défier
de ces conducteurs de bateaux, et d’éviter de s’embarquer
seul avec eux, pour traverser de nuit la rade.
Plusieurs passagers trop confiants ont payé de leur vie
une telle imprudence, et les flots de la baie ont gardé
le secret du crime au prix duquel le nautonier sauva
ses épaules du fouet.
Le,S esclav es u ien iliau t.s.
Ce n’est pas seulement par son travail que le noir
esclave contribue à la fortune de son propriétaire : ia
spéculation a su tirer parti de tout, et le plus chétif
sujet devient encore un moyen de rapport. On le croirait
à peine, si nos grandes villes n’offraient un genre de
spéculation semblable; des noirs estropiés ou lépreux
sont vus mendiant dans les rues de la ville; pour eux?
non, mais bien au profit de celui qui dispose d eux à
son gré. Ainsi voyez-vous, dans la capitale du monde
civilise, de petits Savoyards portant sur leur figure les
noirs vestiges d’un rude labeur, vous tendre une main
suppliante; tandis que le maître, auquel eux aussi se
trouvent fatalement soumis, attend la pièce de monnaie