iiimiseinents ordinaires. Aussilôl coiiimencèreiil les rondes
joyeuses el les jeux de loiite espèce, qui plaisent au
iiiatelol. Mais au bi uit de ces danses écbevelées vieniieiil
se joindie de plus doux accents. Les accords d’un piano
se lonl entendre dans la dunette ; ils accompagnent la
voix d’un des passagers, q u i, à trois mille lieues de la
Lrance, redit les cbanls de la patrie. Plusieurs comme
lui cultivaient ce talent agréable qui cbarjiie dans la solitude,
qui plaît daus la société, el qui, dans la liistesse
même, fait encore goûter de mélancoliques douceurs.
Plusieurs fois déjà la musique avait égayé les réunions
des bôtes de la Bonite. Le piano avait répété, aux applaudissements
de l’assistance , les morceaux les plus goûtés
dans les concerts de Paiis; et les délicieuses romances'
queM. de Mendeville, M. Fisquet el M. Blancliard cban-
laient avec beaucoup de goût, ne manquaient jamais
de provoquer d’unanimes ■suffi ages. Mais pendant plus
de ([uiiizejours le piano était resté muet; les brouillards
et la neige avaient enrlmmé les musiciens : le plaisir de
les entendre de nouveau n’en fui (|ue mieux senli.
L’équipage, jaloux de le partager, fil trêve à ses danses
bruyantes, et pendant cpjelque temps la Bonite se
trouva transformée en une salle de concei t., où, par exception
, aucune rumeur indiscrète n’élouffait la voix des
cbanleurs.
Ce n’est pas sans dessein que je rappelle ces détails
peu importants en apparence. Si quelque lecteur .s’éton-
iKul de les trouver ici, je lui dirais tpi’ils ont puissamment
inilué sur le succès de l’expédition. Entre lanl
de per sonnes réunies sur urt étr'oil bâtiment, il est bien
difficile de toujoui-s conserver une barmonie parfaite:
loirs les caraclèr’es ne sympathisent pas; si cela est vrai
ett général, il y avait à liord de la Bonite, plus qu’ailleurs ■
peut-être, des motifs pour qu’il en fût ainsi; et cependant
jamais aucun différend sérieux ne vint altérer la
bonne intelligence qui unissait entre eux les officiers
aussi bien que leurs nombreux passagers. Je n’bésrte
pas à attribuer cet lieureux résultat aux distractions
salutaires qu’ils avaient su se ménager poulie
plaisir commun, et au milieu desquelles s évanouissaient
bien vile les nuages qui s’élèvent si facilement
dans les discussions que la conversation
amène. M. Vaillant dut regt-eller plus d’une fois que
sa position de commandant l’isolât jusqu’a un certain
point de celte association formée par le plaisir, et dans
laquelle il aurait trouvé probablement de précieuses
occasions de tempérer ce que peut avoir de pénible,
en bien des c a s , l ’exercice rigoureux de la discipline
militaire.
Je conclus de ces obsei-valions que , dans une longue
campagne, on ne saurait prendre trop de soins pour
ménager aux officiers tous les moyens de distraction,
voire même de plaisir, que comporte le séjour du bord.
De pareilles attentions ne sauraient être futiles; car
elles peuvent prévenir le dégoût et l ’ennui, qui aigrissent
les caractères , détruisent l’union , et enfantent