glaces. Chacun à bord faisait des voeux ,.our airiver
promptement dans des climats jdus doux. La gaieté
qui animait d’ordinaire les réunions du carré des officiers
avait disparu. On ne donnait plus aucune attention
ni an beau spectacle de la mer en courroux, ni aux
oiseaux aquatiques, compagnons fidèles de la corvette,
111 aux baleines qu’on rencontrait de temps en temps.
Le pont, couvert de neige et trop exposé au souffle
glacial de la brise, élait déserté par tous ceux qu’un rigoureux
service n’y retenait pas forcément. Heureux
ceux que l ’amour de l’étude soutenait dans ces heures
d’ennui, et qui se sentaient la force de travailler, malgré
le froid et le roulis du navire. M. Gaudicbaud était du
nombre de ces derniers ; plus d’une fois il étonna ses
compagnons de voyage, par celle ténacité au travail
que rien tie pouvait distraire ou attiédir. On l’admirait,
mais on n avait point le courage de l ’imiter.
Cependant à tout prendre il fallait encore s’esliiner
heureux ; car peu de bâtiments sont dans cette saison
aussi favorisés que la Bonite l’avait été jusqu’alors. Le
cap Horn est célèbre par ses tempêtes; souvent, en
hiver, on y est retenu pendant des mois entiers, avant
de pouvoir passer dans l’océan Pacifique; et nos voyageurs
l ’avaient franchi rapidement, sans autre contrariété
que quelques coups de vent, dont un à peine méritait
le nom de tempête.
19 m ai.
Le 19 mai, après 21 jours de navigalion depuis Montevideo,
ils se trouvaient déjà sur le méridien des îles
qui bordent la côte occidentale de Patagonie ; il ne leur
fallait plus qu’un bon vent pour s’élever dans le Nord
et gagner la côte du Chili.
C’était ce bon vent que chacun appelait de ses voeux;
mais avant qu’il arrivât, de nouvelles émotions devaient
réveiller dans le coeur de nos voyageurs l’énergie momentanément
paralysée par la monotonie des derniers
joins.
20 m a i; re n c o n tre des p rem iè re s g laces flo ttan tes.
Le 20 mai, au point du jour (c’est-à-dire vers huit
heures dn matin, car les nuits étaient de 16 heures),
on aperçut pour la première fois une île de glace à deux
milles environ dans le S. O. M. Pironnean était de quart
en ce moment; il fit aussitôt prévenir ses camarades,
qui se bâtèrent de monter sur le pont, pour jouir de ce
nouveau spectacle. Uu d’eux toutefois, C[ui n en était
pas à son premier voyage dans ces latitudes, montrait
beaucoup moins d’empressement à venir admirer l ’île
flottante, dont chacun vantait les gigantesques proportions.
— Patience, disait-il aux curieux qui gourman-
daient sa paresse; patience, mes amis : il y en aura pour