Les eaux chaudes de Thermia déposent à la surface du sol u o sédiment calcaréo-
ferrugineux, qui a formé une espèce de nappe jusqu’à la mer, et là , en atteignant
les sables'du rivage, i l les agglutine et en forme un aggfemérat ferrugineux ou
Grès grossier, composé particulièrement de petits fragmens de Quartz blanc et de
Schistes argileux.
Dans ce second voyage nous eûmes occasion d’observer un f iit trè s-curieux,
qui ne nous avait pas été signalé lors de notre première excursion. Nous y
apprîmes, par hasard, qu’i l existait au village de Sillaka une caverne immense, que
nous nous empressâmes de visiter. Elle est entièrement creusée dans des Schistes
argileux, des Stéaschistes et des Micaschistes très-tenaces et souvent trè s -d ü r s ,
qu’elle traverse presque perpendiculairement au plan des cou che s: circonstances
dans lesquelles aucune véritable caverne n’avait encore été observée. Elle est à peu
près horizontale, et son entrée est située dans le village même, peu au-dessus du
fond d’un ra v in , q u i , dans cet en d ro it , se trpuve bien à 400 ou 4 5 o mètres
au-dessus du niveau de la mer. Nous ne l’avons parcourue qüe sur une étendue
d’environ un demi-kilomètre, bien qu’au dire de nos guides elle aurait plus d’une
lieue de longueu r, évaluation probablement trop exagérée : quoi qu’il en so it,
cette caverne immense présente, dans toutes les parties que nous avons visitées,
absolument les mêmes caractères que les grottes calcaires, mais avec des ¡formes
toutes particulières, qui .tiennent à la nature des roches dans lesquelles elle se
trouve creusée. -
Dans la coupe que nous donnons de cette caverne (voye z la planche X IV de la
2.e série, figure 2 ) , coupe qui n’est pas un plan ex a c t, mais une représentation
théorique de la partie de la caverne que nous avons visitée, nous nous sommes
surtout attaché à en faire sentir les principaux caractères. Ainsi l’on voit qu’elle
se compose d’une suite de cavités plus ou moins larges et plus ou moins hautes,
communiquant entre elles par des passages rétrécis et quelquefois fort étroits- ce
sont tantôt de vastes salles, dont les voûtes* s’élèvent à une grande hauteur ; tantôt
des avenues très-larges et très-surbaissées. Les parois en sont rarement planes ou
parallèles, comme pourraient l’être celles d’une caverne résultant de quelque fente
ou d’un filon q u i, ayant disparu, aurait laissé sa place vide. Au contraire, le long
de ces parôis régnent d’autres excavations sans issues, ressemblant assez à des
fissures élargies ou corrodées par l’actioñ d ’un liquide en mouvement, comme
cela a souvent lieu sur les rivages de la mer, dans des fissures verticales, continuellement
battues par les vagues. Ces excavations latérales, en général fort étroites
et ordinairement creusées entre les strates du terrain, ne sauraient être prises pour
d’anciennes galeries d’exploitation, comme la présence des nombreux filons de Fer
qui traversent la Roch e pourrait d’abord le faire penserj ca r , bien que souvent
fort profondes, elles ne permettraient pas toujours à un homme de pou voir y
pénétrer.
La caverne de Thermia se divise en outre en plusieurs embranchemens dirigés
dans divers sens, et l’on y observe souvent des pointes de la Roch e schisteuse qui
s’élèvent du milieu du so l et s’y présentent comme de ces témoins que réservent les
terrassiers dans leurs travaux. Ces pointes ressemblent encore assez bien à certains
écueils ou saillies de Rochers que l’on remarque parfois au milieu du lit des torrens.
Enfin, les parois offrent partout ces formes arrondies qu’on observe aussi dans la
plupart des grottes calcaires. De nombreux filons de Fer oligiste et oxidé y courent,
comme nous venons de le dire, dans tous les sens, et comme ils ont mieux résisté
que la Roche o ù ils se trouvent renfermés, soit à l’action érosive du liquide, par
lequel les parois ont pu être arrondies, soit plutôt par suite dés actions atmosphériques
et de l’humidité de la caverne, actions q ui agissent depuis un temps
immémo ria l, ils font saillie et présentent seuls avec, quelques filons de Quartz des
arêtes vives; ces filons sont souvent assez nombreux pou r présenter l’aspect d u n
grand réseau qui tapisserait les murs de la caverne. Leur plus grande conservation
prouve évidemment que le courant qui la traversait new.contenait aucun acide corrosif;
car le F e r , plus soluble que la Roche elle-même, aurait été attaqué de préférence;.,
e t , au lieu de faire saillie, ils ne se fussent plus manifestés que par des
cavités. T o u s ces caractères sont d’autant plus faciles à saisir que , par la nature
des Roches et l’absence du Calcaire dans le voisinage, nulles Stalactites ou Stalagmites
ne recouvrent les parois ou le so l, comme cela a ordinairement lieu dans
les cavernes calcaires. L ’on ne peut don c douter que celle-ci n’ait autrefois servi
de passage à un courant souterrain, auquel est dû le dépôt limoneux et argueux
bleuâtre qui forme le sol sur lequel on marche.
Une circonstance qui semblerait venir encore à l’appui de notre opinion, c e s t
que, si l’on examine avec quelque attention la configuration du terrain aux environs
de Sillaka, l ’on vo it qu’il aurait trèfcbien pu former autrefois un petit bassin
fermé, dont lès ëaux n’eussent trouvé d’écoulement que par la caverne elle-même.
Enfin, un fait entièrement analogue, que nous avons eü occasion dobserver
souvent en Morée et dont nous parlerons à l’article de la configuration générale
de cette contrée, doit convertir notre manière de voir en une vérité presque incontestable;
nous voulons parler de ces canaux ou gouffres souterrains, appelés
dans le pays katavothrons (icctrciGoôçov), par où s’écoulent les eaux des grandes
plaines fermées, dont il a été souvent question dans la Relation, et qui donnent
à la Grèce un caractère tout particulier : la Commission avait déjà eu occasion de
remarquer un exemple frappant d’une plaine semblablement fermée a Cujes en
Provence, dont les eaux vont se perdre dans le gouffre de la Roque (voyez pages 5