Mement de terre; puis, sur les huit heures du matin, on en ressentit une plus
forte, qui fut bientôt suivie de détonations qu’accompagnaient des éruptions de
flammes et de fumée. D’énormes rochers, qui jusqu’alors n’avaient paru qu’à fleur
d’eau; s’élevèrent beaucoup au-dessus de son niveau, en même temps que le bouillonnement
de la mer augmenta d’une manière extraordinaire; les mugissemens sout
terrains devinrent presque continuels, et le grand cratère projetait toutes les deux
ou trois minutes et avec un très-grand bruit une quantité considérable de pierres et
de flammes (ou plutôt de lueurs), qui semblaient embraser toute l’atmosphère.
Le i 5 Avril fut remarquable par le nombre des éruptions, qui devinrent si fortes
que les habitans crurent un instant que la nouvelle. île avait sauté ; niais on remarqua,
au contraire, que le cratère s’était considérablement accru en hauteur par
l’accumulation des matières vomies. Ces phénomènes continuèrent jusqu’en 1710,
sans être cependant tpujours aussi fréquens ou aussi violens; les éjections n’étaient
plus guères projetées au-delà de l’île nouvelle, qui ne croissait plus qu’en hauteur
par l ’accumulation continuelle des matières fondues et incohérentes que rejetait le
cratère, et qui, se consolidant, l’élevèrent successivement. On eut occasion d’observer
que les vents du sud semblaient donner aux éruptions une activité qu’elles n’avaient
pas par le vent du nord; nous avons remarqué que les échancrures des cratères de
Mikro- et de Néo-Kaymméni regardent lé nord, tandis que les autres côtés sont
intacts; ce qui indique que les éruptions n’étaient pas tout-à-fait verticales. La haute
température des eaux tout autour de l’île et les dégagemens continuels des gaz et
de la fumée ne permettaient pas aux bateaux d’en approcher à plus de deux cents
pas; le goudron des barques se fut d’ailleurs fondu à une certaine distance.
Ces phénomènes diminuèrent peu- à p eu jusqu’au 8 Septembre de l’année 1711;
époque à laquelle le-volcan parut entièrement éteint; mais le 14 du même mois ,
vers les deux heures de l’après-midi, les éruptions recommencèrent et durèrent
jusqu’après, quatre heures. Durant ce court intervalle il y eut sept explosions
accompagnées d’éruptions, et des. Roches incandescentes, dont plusieurs parurent
avoir un volume de quelques mètres cubes, furent lancées açec beaucoup de
violence et de bruit à des hauteurs et des. distances .très-grandes. Ces .éruptions
étaient accompagnées d’une fumée blanche et épaisse qui s’élevait en forme de
colonne avec assez de force pour n’être pas même fléchie par le vent frais qui
soufflait alors. Les ouvertures latérales vomirent des torrens d’une Lave étincelante,
à teinte rouge, tirant sur le jaune. Après chaque explosion on entendait dans
1 intérieur du cratère un bruit, sourd qui semblait se répéter dominer par des éclxos..
Depuis cet événement, le volcan resta inactif, seulement il s’échappait encore, j e
temps en temps par ses trois embrasures quelques tourbillons de fumée épaisse,
et jusqu’en 1714, lorsqu’il pleuvait, l’on entendait un frémissement semblable à
celui d’un fer chaud que l’on plonge dans l’eau froide; il était occasïoné par la
vaporisation de l’eau, tombant sur tant de Laves et de matières non encore entièrement
refroidies.
Quoique le volcan eût cessé ses vomissemens, on voyait toujours couler, dans
une petite anse située au pied du grand cône, de longues traînées d’une matière
liquide, tantôt jaune, tantôt rougë et le plus souvent verdâtre : cette liqueur, en
se perdant dans^a mer, la troublait dans une étendue de quatre à cinq milles.
L’ouverture du cratère, appelée alors par les habitans de Santorin le grand fourneau
, avait de trente à quarante pieds de diamètre et s’élevait à plus de quatre
cents pieds au-dessus du niveau de la mer. Nous avons déterminé barométriquement
sa hauteur actuelle : elle est de 109“ 2, environ trois cent trente-cinq pieds. Un peu
au-dessous de cette grande bouche étaient les trois ouvertures latérales d o n t 'i l, a
été précédemment parlé; elles avaient de six à sept pieds de diamètré. La principale
â été reconnue par M.le colonel Bory qui-l’a indiquée dans sa carte (voyez Pl^V),
ainsi que dans sa vue des Kaymméni-, la dernière des planches de la 1.” série. Du
côté de Santorin le cône était parfaitement régulier, tandis que dans l’intérieur du
côté du nord il présentait une ouverture par laquelle on arrive encore aujourd’hui
dans l’intérieur de la bouche. L’île entière acquit environ cinq à six milles de tôur
et demeura définitivement composée en‘grande partie de rochers noirs entassés
pêle-mêle.
L’éruption de •1707 est la dëmière qui ait eu lieu à Santorin : c’est donc à tort
q u e , dans son Histoire naturelle des volcans, Ordinaire en place une en 1767;
ce qu’il dit de celle-ci doit se rapporter à celle qui vient de nous occuper. Cette
erreur a été reproduite dans ces derniers temps par M. J. Girardin, dans son excellent
ouvrage intitulé : Considérations générales sur les volcans (1 vol. in-8.°, Rouen,
1-831). Les cônes d’éruption de la Petite- et de la Nouvelle-Kaymméni, en établissant
des canaux de communication directe de l’intérieur du volcan avec l’atmosphère,
ne permettent plus de le séparer, ainsi que quelques géologues modernes ont voulu
le faire, des volcans brûlans ordinaires.
Tous les détails qui précèdent se rapportent parfaitement avec ce que nous avons
observé sur la Nouvelle-Kaymméni, dont la surface est à peu près égale à celle de
la Grande-Kaymméni ; sa plus grande longueur.est du S. S. O. au N. N. E., et peut
avoir environ deux milles; sa circonférence est de cinq à six milles. Elle n’est.séparée
de la Petite-Kaymméni que par un canal fort étroit, appelé Diapori. Ôn nous a
assuré qu’il s’y dégageait encore quelquefois des gaz méphitiques et que les eaux y
changeaient aussi de couleur. Plusieurs bâtimens de guerre ayant eu occasion de
rester mouillés pendant quelque temps entre les deux Kaymméni, on s’aperçut que
leur doublage s’était nettoyé et débarrassé des Balanes, des Anatifes, etc., et des