Ces provinces du moyen âge et du temps de la domination vénitienne, disparurent
définitivement par la prisé de possession des Turc s vers le premier quart du
siècle dernier; mais on ne les en retroqye pas moins dans tous les livres imprimés
o u . réimprimés depuis, parce qu’elles sont toujours dans Coronelli, que chacun
copie, et qu’on copiera probablement plus d’une fois encore, malgré ce que nous
en-pourrions dire. I l n’est pas jusqu’aux dernières éditions de Malte-Brun où elles
n’aient été récemment soignéusement reproduites; elles passeront sans doute.de cet
auteur dans ces publications a bon marché qui manquent si souvent leur but, parce
que,gàites f o u r la plupart aux dépens des vieux livres, elles propagent beaucoup plus
d’erreùfé*qiie de vérités. Cependant les Turc s,' q u i, ayant fait d’abord leur capitale
de Modon, fondèrent ensuite Tripolitsa, pou r devenir le chePlieu' de leur, gouvernement,
dans une position centrale, changèrent, en bâtissant cette v ille , toute la
division du pays; et c’est leur manière de répartition en cantons, appelés Éparchies
( ’E7 tx s%m ) que lé président Capoyllslria trouva établie en Grèce lors de son arrivée.
Ces éparchies étaient an n o in b rS tè v in g t - s ix , sans compter le Magné, dont les
- Musulmans n’étaient jamais parvenus à s’emparer. Mais bientôt on le porta à vingt-
h u it , en y ajoutant ce-Magne, que l’on comptait pou r deux, s a v o iy î Sparte occidentale
ou épàrchie de Chimova, et Sparte orientale on éparcbie de Marathonisi;
car,-ainsi qu’ôn 1% vu dans notre Rela tion, les Mainotës prétendent toujours être
les d^cendans dès véritables Spartiates. Quelques-unes de ces éparchies, telles que
celles de Mistra, de G astouni, de Karytène ou-de Cb rim he, sont fort- grandes;
d’autres, ce lle de Nisi, par exemple, qui ne comprend que trois villages, sont fort
peu considérables. ■ .
L e président essaya d’abord d’une autre-manière : il divisa les Oyclades em six
provinces et la M orée en sept, nommant ces arroiidissemens des Épitropies •( Ë-ari-
qui avaient, par leur circonscription, assez de rapport avec les.divisions
de l'antiquité. La constitution physique de la Grèce, nôn moins que les nobles et
patriotiques souvenirs qui se rattachent aux noms dJËffide, d’Achaïe, de Messénie,
d ’Arcadie, de Laconie et d’A rgolide , fera n é c e s s â i® en t plus tard revenir à ces
divisions ou du moins à ce qui s’en, rapprochera le.plus. M- Capo d’Istna, en créant
une septième.épitfopie par le partage de la La con ie , voulut seulement essayer.de
rompre certains liens qui unissaient les Mainotes dans un esprit d’insubordination
ou de rébellion presque continuel; mais il s’aperçut bientôt que le temps de réaliser
un tel projet n’était pas v en u , et les habitans, toujours divisés entre eu x, mais
étroitement unis quand la cause commune les appelle au combat , se regardent
encore à l’h eure qu’il est comme unè nation à part, indivisible, essentiellément libre
et n’acceptant de dépendance que celle qui leur peut être individuellement profitable.
Chacune des épitropies d e M. Çapo d’Istria était administrée par une sorte de préfet
g éo g rap h ie . 5 7
( qni avait sous s.es ordres des gouverneurs dans les principaux chefslieu
x de cantons, et des démogérondies ou municipalités dans les villages. L ’administration
ayant souvent été entravée ou paralysée dans plusieurs de ces provinces,
dont les parties n’avaient eu jusqu’a lors que peu Ou po in t de rapport entre elles,
i l fallut recourir à de nouveaux essais, subdiviser les épitropies, nommer des commissions
extraordinaires, dont-l’autorité s’étendait pou r un temps sur telles ou telles
fractions de territoire, réunies ou divisées selon l’intérêt du m om en tje t 1 on ne sait
encore à'q u e l projet s’arrêtera enfin le gouvernement actuel. .
On conçoit que dans un pays, montueux, très-coupé, où.d e grande^ révolutions
physiques ont occasioné des bassins isolés, sans communications les uns avec les
■autres, une profonde diversité, de moeurs, fondée sur des intérêts très-différens, a dû
s’enraciner chez les habitans : de là ,ces anciens États du Péloponnèse, si fameux
dans l’h istoire, qui eurent chacun leur patriotisme à p a rt , et dont l’esprit caractéristique
reparaîtra toujours; quelque espèce de civilisation qu on tente d introduire
aux mêmes lieu x, tant que des communicationsÉiien tracées dans les cols’ des hautes
montagnes, de bonnes routes pavées à travers les^iarais et des ponts solides jetés
sur les rivières ou sur les torrens, n’effaceront pas les barrières que posa la nature.
M. Capo d’Istria sentait parfaitement ce ci; il m’en a plus d’une fois ^entretenu, et
lorsque, revenant du Magne, je lu i représentais qu’én aplanissant le chemin terrible
qui conduit de Calamata à Mistrâ , et la route dangereuse q u i côtoie la p p in te
Laconienne où se prolonge le système du Taygète,. on se fût bien mieux assuré du
pa ys, qu’en en mêlant une moitié à la Messénie et l’autre au pays des Hélotes, il
m’avoua que le manque de.fonds seulement l’empêchait d’établir ces bases d’une
nouvelle civilisation. On a beaucoup parlé des grands chemins qu’i l a faits; excepté
ce lâ i d’A rgos à Napoli, qui n’a pas deux lieues d’étendue en plain e, M. Capo d’Istria
n’a pas eu lé temps de percer cent mètres de bonne route dans les lieux où de telles
constructions seraient si utiles. On ne saurait citer dans aucun canton de l’intérieur
un chemin d’un quart de lieue carrossable, c ’est-à-dirè sur lequel de l’artillerie ou
des chariots pussent ro u lé r ’-en tout temps ; les Grecs ont d’a illeurs la singulière
habitude de ne respecter nulle part la voie publique : pou r peu qù’il entre dans la
convenance d’un particulier puissant pu seulement aisé de bâtir sa maison en travers
d ’un passage, ou de labourer à l’endroit où les voyageurs circulèrent jusqu’a lors,
i l n’hésite pas un instant, au risque d’interrompre la communication la p lu s fréquentée
et de guerroyer pour; défendre son usurpation; il faut, alors què les passans
cherchent une nouvelle issue à droite ou à gauche, comme ils peuvent; et j’ai vu
dans là plaine de Francovritzi, par exemple, de ces travaux de campagne que les
Palicares nomment des tambours, pou r l’élévation desquels ces guerriers impré-
voyans avaient employé le pavé d’une chaussée Vénitienne, jusqu’alors.assez bien
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