Pausanias seul donne, mais d’une manière vague, l’époque de ce phénomène,
en le rapportant au règne d’Antigone, fils*:de Démétrius; c’est-à-dire entre les
années 233 et 221, et non 277 et 244 5 comme l’a dit Gosselin, en confondant
les deux Antigone. Il est très-remarquable que cette époque coïncide avec la date
bien connue (la iSg.6 olympiade, 223 avant Jésus-Christ) du grand tremblement
de terre qui, suivant le même auteur1, détruisit Rhodes et Sicyone, villes situées,
l’une à l’ouest, l’autre à l’est du foyer volcanique de Méthana. Nous nous croyons
donc fondé à établir, que l’apparition momentanée d’une bouche volcanique à
Méthana fut contemporaine de la première destruction de Rhodes et de celle de
Sicyone ; d’où il résulte que la direction de ce grand tremblement de terre fut à
peu près parallèle à la ligne des îles volcaniques de Santorin à Méthana, et à la
chaîne Achaïque.
Les sources thermales, produits des phénomènes volcaniques, paraissent avoir
été plus nombreuses qu’elles ne le sont aujourd’hui; Pausanias en cite deux, dont
l’une, celle des bains d’Hélène, près Corinthe, approchait de la température de
l’eau bouillante; et l’autre, à Phigalée dans l’Arcadie, qui toutes deux ont perdu
leur chaleur. Méthana en renferme deux, qui apparurent lors des phénomènes
volcaniques; nous citerons en outre, dans l’isthme, Loutraki, connu des anciens
sous le nom de Thermæ, et Kounoupéli, sur la côte de l’Élide.
La source de Pirène, au sommet de l’Acrocorinthe, doit, suivant nous, être
rangée dans les sources thermales, sous le rapport de l’origine, quoique sa température
n’ait rien de particulier; m'ais ni les infiltrations, ni la théorie des siphons,
ne peuvent expliquer sa présence au sommet d’un pic isolé, que des collines de
Calcaires fendillés et des gorges profondes séparent au loin des montagnes plus
élevées.
D’un côté de l’isthme, les eaux thermales de Loutraki, et de l’autre, sur le
golfe d’Ég ine, les petites solfatares de Kalamachi, indiquent que les actions ignées
s’exercent sous l’isthme dans la direction des tremblemens de terre les plus fré*
quens en Grèce.; en sorte qu’il ne serait pas impossible qu’on dût un jour à leur
action la séparation du Péloponnèse, objet de grands et inutiles travaux.
Le tremblement de terre qui, en 373 avant Jésus-Christ, renversa Hélice et
Bura, ravagea toute l’Achaïe, et par conséquent suivait la direction que nous
venons d’indiquer; cependant, d’après la description que nous en a laissée Pausanias,
les secousses étaient verticales et annonçaient un foyer sous-marin. Le
tremblement de terre récent, qui détruisit Vostitza à deux lieues de là, eut les
mêmes caractères.
Paus., Corinth., chap. YII.
Le soulèvement de Méthana paraît avoir été le plus puissant des effets d’un
tremblement de terre qui suivait encore la même direction, et s’étendit de Rhodes
jusqu’au-delà de Sicyone, comme nous venons de le dire en parlant de Méthana.
On voit se manifester une autre direction des forces volcaniques dans le grand
tremblement de terre relaté par Thucydide : Orobie, dans l’Eubée, parut en être
le centre: la ville fut en partie soulevée, en partie engloutie, et l’action se fit
ressentir à plus de vingt-cinq lieues de là, vers le nord %-est et le sud f - ouest;
d’un côté, jusqu’à l’île Péparéthus; de l’autre, jusqu’à Athènes, dont les murs et
le Prytanée furent renversés.
On voit dans l’histoire la preuve de l’indépendance des foyers volcaniques dans
la Grèce, et de leur concentration sur des directions de fractures toujours étroites,
quelque prolongées qu’elles soient : ainsi Égine, Sicyone, Éleusis, furent renversées
à diverses époques, sans que les villes voisines éprouvassent le même sort.
A Méthana, trois acropoles cyclopéennes ou helléniques se sont conservées dans
la partie méridionale et orientale de la petite presqu’île; et cette commotion, qui
s’étendit de Rhodes à Méthana et à Sicyone, au temps d’Aratus, produisit si peu
d’effets dans le reste de la Grèce, que Polybe, l’historien de la ligue Achéenne,
n’en a pas fait mention. De même, le tremblement de terre qui, en 469 avant
Jésus-Christ, renversa Sparte de fond en comble et fit écrouler un pic du Tay-
gète, se fit si peu sentir dans le reste du Péloponnèse, que l’histoire n’y mentionna
pas ses effets.
On ne peut douter que les phénomènes volcaniques sous-marins n’aient, à
diverses époques, lancé la mer sur les plaines basses des golfes de la Grèce, et
causé de grands ravages au milieu des populations qui y ont toujours été agglomérées.
Ammien Marcellin nous a conservé le souvenir d’un phénomène de ce
genre, dont il fut le témoin l’année 365 après Jésus-Christ. La mer s’éleva jusqu’à
la hauteur des maisons dans Alexandrie, et à deux cent cinquante lieues de là,
il vit à Mothone (aujourd’hui Modon), sur les côtes de Messénie, un vaisseau que
les vagues avaient jeté à deux milles dans l’intérieur des terres. L’exagération est
évidente pour qui connaît les lieux; mais on ne peut douter néanmoins que ce fait
n’eût produit de grands désastres et une grande sensation, si la Grèce n’avait été
alors presque effacée de l’histoire du monde.
En voyant donc les annales historiques d’Athènes, de Mégare et d’Argos, s’arrêter
à peu près à une même époque, et signaler en même temps un déluge
passager; en voyant à Argos un temple de Neptune inondateur, construit sur la
place où les flots s’étaient arrêtés à une époque qu’on regardait également comme
en dehors des véritables temps historiques (sotts Inachus), nous nous croyons
fondé à penser que, antérieurement à la colonisation égyptienne, les côtes de la