douleur; elle ressemblait à de la potasse déliquescente; c’estt probablement de cette
substance dont parle aussi Tourneforten disant qu’il y a d’autres grottes d’où
distille, goutte à goutte, une solution.d’Alun beaucoup plus âcre que celle de
l’Alun ordinaire, et d’une stypticité presque coripsive; il ajoute que les galgux vont
dans ces grottes, s’y bassinent légèrement les endroits les plus maltraités de la peau
avec cette liqueur d’Alun, se lavent un quart d’heure après avec l’eau de la mer,
et guérissent ordinairement sans faire d’autre remède. Ce phénomène, que nous
avons vu se répéter dans l’isthme de Corinthe, où nous avons pu recueillir la
liqueur, est dû, ainsi qu’elle nous a-permis de le constater, à du Sulfate de Fer
presque pur. ., , , + V
Les anciens distinguaient deux sortes d’Alun, le concret ou Alun de plume, que
les Grecs appelaient , TÇt%iris (chevelu, soyeux ou capillaire), et que
Pline1 regardait comme le. produit de certaines pierres, d’où il transsude, dit-il,
sous forAe'd’écume. L’Alun liquide était de deux- espèces : l’un, p ur et de couleur
de lait, étarfc appelé Phorimon; l’autre, grossier et de couleur pâle, était désigné
par le nomade Paraphoron. Ces Aluns liquides des anciens, qui avaient pour
propriétés d’être astringens, de durcir et de corroder,, étaient vraisemblablement
ces Sulfates de Fer que nous avons vus suinter du sol à Milo et de l’isthme de
Corinthe. Les anciens ne paraissent pas, en effet, avoir connu notre véritable Alun,
et ce qu|ils appelaient ainsi, n’était que l!Alun de plume ou simplement le Sulfate
de Fer, nommé vulgairement aujourd’hui Vitriol.
Dioscoride2 et Pline assurent qu’après l’Alun d’Égypte, celui de Mélos était le
plus estimé; ce dernier ajoute que l’île en fournissait de deux sortes, l’un liquide,
c’était l’espèce nommée Phorimon, et l’autre concret. Cependant Diodore de Sicile
dit que de son temps son exploitation s’y réduisait à bien peu de chose. Le premier
de ces auteurs assure aussi que l’Alun de Mélos empêchait les femmes de concevoir.
Enfin, on voit, d après des passages d’Aulu-Gelle^ et d’Ammien Marcellin4, que les
anciens connaissaient, comme nous, la propriété que possède l’Alun de rendre les
corps qui en sont imprégnés moins combustibles,, et qu’ils en ont fait souvent
l’application avec succès, dans plusieurs circonstances mémorables.
Pierres meulières. Lès Pierres meulières, connues sous le nom de Pierres de Milo
(M>/À toc 7JÎtçcc ), ne sont autre chose que des Brèches ponceuses, des Pépérinos,
des conglomérats trachyliques, etc., silicifiés et passés à l’état de Silex cariés
alunifères, à cavités angulaires, irrégulières, plus ou moins grandes, paraissant
1. Lïb. XXXV, cap.
2. LU. V, cap. 122.
3. Noct. Attic., lïb. XVf cdp. i .
i\.*Lïb. XX , cap. i l .
dues à la disparition des fragmens ou détritus ponceux; souvent les surfaces en sont
rugueuses, scoriacées et fibroïdes, comme la Pierre ponce elle-même. On reconnaît
encore dans la pâte siliceuse de petits fragmens qui ont échappé à l’altération
complète de la masse. Cette altération ou transmutation par suite des actions chimiques
est évidente;'on peut en suivre dans cette Roche fes différentes gradations,
depuis les points les moins altérés jusqu’à ceux où-, arrivant à l’état de Silex carié,
elle ne présente en quelque sorte plus que le squelette siliceux de la Roche primitive:1
Les Silex molaires présentent plusieurs variétés : la plus commune est d’un gris
blanchâtre, quelquefois à teintes rouges ou violacées; il y en a de jaune-paille,
-d’orangées, et d’autres d’un rouge-brun ou nuancées de teintes lie de vin (voyez
Pl. XI). Le Soufre se trouvé'quelquefois en filons ou en amas dans les fentes ou
cavités des Silex meulières, qu’on exploite sur plusieurs points : les principales
carrières sont situées vers lè cap Rheuma. On en fait des meules, qui donnent lieu
à un commerce assez étendu. Ces meules sont ordinairement composées de plusieurs
morceaux; elles sont recherchées pour leurs excellentes qualités, surtout à
cause de leur grande légèreté. On en exporte à ‘Smyrne, -èn Égypte, en Moréé, à
Ancone, à Zante, à Céphalënie et aux autres îles Ioniennes, à Candie, dans tout
l’Archipel et même jusqu’à Constantinople.
Plusieurs auteurs Ont prétendu que l’île de Milo tirait son nom du mot pvXos ;
qui, en grec ancien et moderne, signifie moulin : c’est une erreur, car les“pierres
meulières de Milo ne paraissent pas avoir^été exploitées dans l’antiquité ; si elles
l’eussent été, les anciens auteurs n’auraient pas manqué d’en parler. Cependant Pline 2
cite un Silex ou Lapis molaris qui donnait tant de feu qu’on l’avait appelé Pyrites;
mais il n’indique point d’où on le tirait, et il ajoute d’ailleurs qu’on en faisait une
chaux de mauvaise qualité, ce qui ne peut s’appliquer à la Pierre meulière de Milo,
mais bien à .quelque Calcaire siliceux d’eau douce, comme là meulière des environs
de Paris. Quelques personnes ont prétendu aussi que le nom de Milo venait de
pviKov (pomme), d’où elles concluaient que les Pommiers devaient avoir été très-
répandus autrefois dans l’île; mais ces suppositions gratuites n’ont d’autre fondement
que la ressemblance des mots pvXos et pr/Xov avec le nom ancien et moderne de
1 . O n co n ço it même q u e , dans cette transmutation d’une Ro che conglomérée, en u n e Roche
h om o g èn e , i l n e soit pas nécessaire, p o u r e xpliquer les cavités qu’e lle peut p résen ter, de faire
dissoudre et ensuite enlever p a r les agens chimiques u n e partie des fragmens q u i la constituaient
avant l ’o p é ra tio n , et que tous ses é lém en s, en se réunissant en u n e masse com pacte , comme le
S ile x , p a r e x em p le, doivent laisser, dans l ’intérieur des couches des'vides , dont la .so in m e , ajoutée
à celle des p le in s , d o it être cgale à - l ’espace q u ’elles occupaient antérieurement. O r , p o u r une
Roche d’u n tissu aussi lâche q u e le sont les conglomérats ponceux dont i l s’a g it i c i , i l est fac ile
de v o ir que la somme des vides ou ca vité s , après sa transmutation, doit être tÿcs-ponsiderablc.
2. Lib. X X X V I, cap.^i8.