mais au lieu de réparer le mal, ils se contentent d’anathémâtiser les sources taries,
en les comblant de pierres. Un effet plus désastreux encore est l’accroissement
de la violence et des produits des torrens, qui dévastent une grande partie des
plaines inférieures.
Les premières traditions historiques montrent que l’établissement de l’homme
dans le Péloponnèse fut une longue conquête sur les animaux qui peuplaient ses
forêts et ses montagnes. Les lions et les ours disparurent d’abord, et il y a deux
mille ans que l’on n’en trouvait déjà plus que dans le Pinde. Des recherches plus
heureuses que les nôtres montreront, dans les cavernes delà Grèce, indépendamment
des animaux d’espèces perdues, les ossemens de ces grands carnassiers réunis
a ceux de 1 homme et à quelques débris grossiers de son industrie, comme dans
les cavernes du midi de la France, et au-dessus, les dépôts ossifères qui se forment
depuis plus de trois mille ans,-composés des ossemens de diverses variétés de notre
race, des animaux domestiques, du lynx et du loup, les seuls carnassiers qui disputent
encore aux bergers la possession des montagnes.
A ces phénomènes généraux nous devons ajouter les modifications locales,
mais indestructibles, que l’homme a apportées au sol de la Grèce ; de ce nombre
sont: les cryptes, tombeaux souterrains, taillés dans le rocher, et d’immenses
carrières creusées avec régularité, soit à ciel ouvert, soit à galeries souterraines.
Partout ou Ion rencontrait les diverses variétés de Calcaire tertiaire que les
anciens désignaient sous les noms de Poros ou de Conchylites lapis, les bancs
en ont été presque entièrement enlevés. Nous citerons Égine, Mégare, Corinthe,
les carrières près dÉlaphonisi, Modon, etc., comme les lieux où nous avons vu
1 action destructive de l’homme sur le Terrain tertiaire plus largement empreinte;
ses constructions peuvent être regardées comme des caractères géognostiques presque
aussi ineffaçables; les monumens cyclopéens ont traversé trente siècles sur un
sol sans cesse agité par les tremblemens de terre, et ne portent d’autres traces de
destruction que celles dues à la main des hommes.
Mais cest surtout en réfléchissant au nombre immense de monumens de l’industrie
humaine, enfouis au sein des mers de la Grèce depuis les siècles historiques,
que nous concevons une haute idée des témoignages indestructibles que
1 homme a laissés de ses oeuvres. Quelle masse d’ossemens humains et de débris de
1 industrie de tous les ages, la seule rade de Navarin, lieu néfaste il est vrai dans
l’histoire de nos devanciers, n’a-t-elle pas engloutie depuis trente siècles! Il en est
a peu près de même du golfe de Lépante, de celui d’Athènes et de toute la
Méditerranée, où des milliers de bâlimens se perdent chaque siècle, où des dépôts
de Marnes, de Sables, de Calcaires, les conservent et établissent leur ordre de succession.
Qu’un phénomène de soulèvement vienne à mettre au jour une partie du
fond de ces mers, non en entassant des scories autour d’une bouche ignivome,
comme le font les phénomènes volcaniques, mais en soulevant une partie de
l’écorce terrestre ; alors, au lieu de quelques ossemens, de quelques végétaux ou
coquilles fragiles, conservés intacts au milieu des dépôts anciens, analogues d’ailleurs
à ceux qui se forment de nos jours, on trouvera dans les ossemens des
diverses races, dans les médailles et tous lès produits de leur industrie , de
véritables archives pour l’histoire du genre humain.