on appela ensuite celle-ci A rg ià où Argo. Mais elle changea de nom sous OEgialus,
premier roi de S ic yon e , fils d’Inachus, selon Apollod ore, et frère de P h o ro n é 1,
pou r prendre celui d’OEgialie jusque vers 16 47 > temps, si l ’on s’en rapporte à
Plin e, où j sous Apis, troisième roi d’A rgo s , on la nomma A p ia . Elle perdit cette
quatrième désignation 420 ans plus tard, pou r s’appeler enfin Péloponnèse, « comme
« qui dirait l ’Isle de Pelops , ores qu’elle ne soit Isle », dit'en son vieux langage
Jadocus Hundius2, traducteur de Mercator. I l peut se faire que dans ces temps
obscurs deux Apis aient régné sur Argos naissante ; mais il n’est pas croyable que,
ces deux Apis s’étant rendus l ’un après l’autre sur les rives du N il, le premier y
soit devenu la divinité qu’on adorait sous la figure d’un boeuf, et l’autre le grand
Sérapis, dont S. Augustin rapporte l’h istoire en ces termes3 : « A u temps des
K patriarches Jacob et Joseph, A p is , ro i des Argiens, aborda en Égypte avec une
« flotte; i l y mou ru t, et il fut établi le plus grand dieu des Égyptiens. Son nom
« vint de ce que le tombeau, que nous appelons sarcophage, se nomme en grec
1 soros, et comme on adora Apis dans son tombeau avant qu’on lu i eût bâti un
« temple, de soros et d'A p is on fit d’abord Sorapis, et par le changement d ’une
K lettre on l’appela Sérapis. ” Quant à Pélops, chacun sait qu’i l était fils de Tantale,
ro i de Lydie, et n on de P hryg ie, comme aucuns l’ont imprimé. I l est plus connu
dans les temps héroïques, que les Apis d’A rgos, pou r avoir été servi en ragoût par
son propre père à la cou r céleste, un soir que, voyageant sur la terre à la manière
des simples mortels , elle s’invita à souper chez sa majesté lydienne. « Gérés, dit
K Ovide, un peu plus gourmande que les autres puissances de l ’O lympe, avait déjà
mangé l’épaule du prince, lorsque Jupiter, devinant le crime, ressuscita P é lo p s ;”
mais ne pouvant lui rendre ce que la déesse sa soeur en digérait, i l y substitua
l ’équivalent en éblouissante ivoire ; d’o ù vient que les poètes ont souvent appelé
des épaules de Pélops, celles des beautés qu’ils célébraient dans leurs couplets. Le
fils de Tantale, avec son épaule d’ivoire, ne se fiant probablement p lus aux tendresses
d’un père qui l’avait fait cuire une fois, passa en Élid e, où il épousa Hippodamie,
fille d’OEnomaüs, et devint roi du pays, après avoir causé la mort dè son beau-père,
qu’il fit traîtreusement tomber d’un ch a r , dont les essieux avaient été sciés. De
tels contes n’eussent jamais dû être admis dans des livres sérieux, même pou r
justifier les plus ingénieuses étymologies; et peut-on c ro ire , pou r rendre raison
des noms de lieu x, à ces impositions et à ces imitations de noms de princes, la
plupart fabuleux, ou de fondateurs incertains, si fréquentes aux temps des ténébreuses
origines, mais qui sont si peu usitées en réalité que nos temps modernes
n’en offrent guère d’exemple, si ce n’est au Nouveau-Monde, en Pensylvanie et dans
(1) Hérodote, lib. V I I , cap. 94. — (2) Edition de 1609, p. 329. — (3) Cirit. Pci, 4.
la république de Bolivia. Q u o i q u ï l en so it,, ayant tous ces prétendus rois du
Péloponnèse, la contrée était certainement peuplée ; des hommes long -temps
ignorés de ceux q pi ¿étaient déjà façonnés à certain mode de civilisation, y durent
disputer pendant bien des,siècles leur pâture aux animaux des bois; ils vivaient
sans arts et forent peut-être sans langage, jusqu’à l’époque où des navigateurs venus
d’Égypte et de P h é n ifie ,*poussant leurs découvertes en des contrées nou ve lles,
trouvèrent enfin la Grèce, qui fa t long-temps pou r eux comme le Nouveau-Monde
était aux quatorzième et quinzième siècles pou r les aventuriers de l’Europe occidentale,
Les sauvages antérieurs à la venue d ’Inachus se disaient nés sur p la ce;
et Hésiode, le plus ancien des poètes grecs dont les oeuvres soient parvenues
jusqu’à nous et qui fut au moins contemporain d’H omère, s’il ne vécut un soecle
avant lu i , Hésiode nous dit que Pélasge, enfant de la T e r r e , fa t le premier
homme q ui ait apparu dans le pa ys; ce Pélasge, ajou te-Pon , donna son nom aux
peuples d’alors. Mais quels étaient ces peuples? H enseigna aux Arcadiens. dit-on
encore, à se bâtir des m a ison s,îin si qu’à manger les fruits du Hêtre ou plutôt du
Chêne à gland doux; car le Hêtre est beaucoup moins commun dans le pays que
ce dernier arbre. Il existait donc des Arcadiens, à qui le prétendu premier homme
p u t enseigner quelque ch o se; et cette tradition rappelle celle de la Genèse, où
Ca ïn,-qui, après avoir tué son frère A h e l, restant avec Adam, Ève et sa femme, la
quatrième personne du genre humain sur la t e r re , bâtit une v ille , q u i l appela
Hénos, en commémoration d'un fils q ui v ient à lùi naître. O r, le nom de ce Pélasge,
qui le premier apparaît sur le sol de la G rè ce , o ù i l ébauche la civilisation arcadienne,
pourrait bien être symbolique, et signifier aussi un homme venu par mer, un peu
moins ignorant que les sauvages chez lesquels il apparut, sans q u o n dise d o ù il
venait, mais q ui ne laisse d’autre trace de sa venue, dans un temps où 1 écriture
n’était probablement pas encore connu e, qu’une désignation dont la racine grecque
signifie l’O céan ou les grandes eaux, par où des étrangers commençaient à pénétrer
en Europe. L y ca o n , fils de ce Pélasge, premier homme, conséquemment le
second, bâtit/à l’exemple de CJnn, cette v ille de Ly cosu re, située sur une montagne,
qui, de même que celle d’Henos dans la Bible, passe p ou r la plus ancienne de toutes;
ce serait celle dont "les hommes descendirent, au dire de Pausanias, et de laquelle
nous croyons avoir retrouvé les véritables restes, ainsi qu on 1 a vu dans la Relation,
Je ne conclurai pas de la comparaison que j’ai faite plus haut, comme n’eussent pas
manqué de le faire les érudits du siècle dernier, que Pélasge soit le même qu’A -
dam, Ly caon le même que Caïn et la ville d’Hénos la même que Lycosure; mais
je ferai remarquer qu’i l n’y aurait rien de contraire au bon sens à supposer que cette
v ille de Lycosure ait été réellement le premier lieu fortifié dans le pays, et que les,
hommes q u i, sur le sol de la Morée ac tu elle , furent alors connus sous le nom