CHAPITRE L.
Départ pour Djébel-BarkaL — Position d’une tille ancienne. —
Caravane d’esclaves.— Province de R obâtât.— Ile M erro.—
Température.— Rocher remarquable, du nom de Meroueh. —
Ile de Moqrât. — Abou-Hamed ; sa route jusqu’à Sebou’. — Arrivée
de Gellabes; leurs souffrances dans ïe désert.-—Forteresse
el-Karmel.— Rapport de Strabon concernant Napata. — Singes
verts. — Autres ruines d’el-Mârouk. — Village d’el-Kâb. —
Ruines chrétiennes. — Arrivée à Djébel-Barkal.
Les récoltes, faute de pluie, avaient manqué
dans tout le Barbar -, le séjour et ie passage fréquent
des troupes y avaient épuisé toutes les
provisions; on ne trouvait ni dourah, ni orge,
ni paille pour les chameaux, ni même du bois;'
enfin la disette et la misère y étaient au comble.
Nous fûmes forcés d’avoir recours au gouverneur,
afin d’obtenir un peu de paille pour nos
dromadaires.
Ce fieu n’ayant plus rien qui pût piquer ma
curiosité , je ne m’y arrêtai que ce jour - là ,
pour laisser reposer nos bêtes ; et ie 9, à sept
heures du matin, nous partîmes pour la province
de Robâtât. J’étais bien aise de suivre ie grand
contour que fait le fleuve dans cette province ;
j’avais l’espoir d’y trouver des ruines : nous longeâmes
donc le Nil à peu de distance. A trois
heures d’ei-Mekheyr, près delà route, je reconnus
de nombreux amas de décombres, qui occupaient
une vaste étendue de terrain ; ils consistaient
en briques cuites et autres matériaux brisés.
Je jugeai que ce fieu fut jadis remplacement d’une
ville. Ici des bouquets d’acaçias nous masquaient
par intervalle la vue du fleuve. A l’est, les regards
s’étendaient sur d’immenses plaines désertes. A
deux heures j nous nous arrêtâmes dans le grand
village d’el-A’beydyeh.
Le 10, à six heures et demie, nous nous remîmes
en marche. A partir de là, le cours du
Nil suit pendant quelques lieues fine direction
nord-ouest. Après avoir marché quatre heures
et laissé derrière nous plusieurs îles et quelques
villages, nous rencontrâmes celui de Qeneyney-
teh, à partir duquel aucun autre lieu habité ne
s’offrit plus ce jour-là à notre vue : les terres, dans
tout ce trajet, n’étaient qu’un vaste désert. Quelques
roches éparses se montrèrent à midi sut
le Nil ; elles se rattachent à une petite cataracte.
A notre droite, le désert, parsemé de monticules
de sable et de quelques végétaux, s’avance jusqu’au
fleuve, dont le lit, sur ce point, semble être
barré par une chaîne de sept îles de front, et
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