qu’ils pratiquent cette cruelle opération, pour
laquelle on leur paie de quatre à cinq talaris.
Un esclave mâle, qui se vend vingt-cinq talaris,
taux moyen, en vaut jusqu’à cent, lorsqu’il est
privé des facultés viriles. On conçoit combien
l’appât d’un si gros bénéfice doit encourager à
multiplier les victimes de cet attentat contre
l’humanité. On assure qu’il se fait à Tahtah cent
à cent cinquante eunuques par an. Il s’en expédie
beaucoup pour les harems de l’Asie mineure. En
1812, à l’arrivée d’une grande caravane, le vice-
roi fit ainsi mutiler deux cents malheureux, pour
les envoyer au grand seigneur à Constantinople.
Cette digression m’a un peu éloigné du marché
de Ghendy; je m’empresse d’y revenir. On y voit
trois rangs de petites boutiques, qui sont élevées
de trois pieds environ au-dessus du sol, comme r ■ celles des marchés de la Haute-Egypte. Le marchand
s’y tient les jambes croisées, et en remplit
à lui seul la moitié de l’espace! On y vend en
détail des articles de droguerie, d’épicerie, des
conteries de Venise et divers objets de menue
mercerie. D’ autres marchands se placent à terre,
au-dessous de ces boutiques. Comme au Sennâr,
avec du dourah, on peut s’y procurer presque
toutes les choses nécessaires à la consommation
journalière. La viande est coupée par tranches
et se veqd au lot. On se sert de poids en pierre,
pour peser à la balance. Des coquës doeufs
d’autruche -servent de mesures pour la tente du
beurre-,
On tire d’Égypte des toiles de kambri (coton);
des peaux de mouton teintes ordinairement en
bleu, sur lesquelles on se couche pour dormir,
et que l’on place sur les selles de%dromadaires.
De là, il vient aussi du sucre, du savon, des
perles en.verre pour colliers et bracelets, des
grains de corail commun , des chapelets d ambre
jaune, et d’autres faits avec les noyaux des fruits
du doum, à l’usage des dévots; de petits miroirs
dits de Venise, ronds ou carrés, qui font indis-
pensablement partie du trousseau des jeunes
mariées; du papier de Gènes et de Livoürne;
des lames de sabre à deux tranchans, provenant
de l’Allemagne ; des aiguilles, des limes, de
l’acier, de petites sonnettes ; de l’antimoine pour
se noircir les cils ; du henneh, que quelques
femmes emploient pour se rougir les ongles; des
bracelets d’argent, dé l’étain, du poivre, de la
cannelle, des clous dé girofle, &c. Les marchands
de Saouâkin, nommés Adharebs, vont jusqu’au
Sennâr et au Kourdofan. Ils sont en concurrence