ville, d’ailleurs, se crée avant ses tombeaux. Les
petits matériaux employés aux constructions,
sous ce climat pluvieux, durent aussi nécessiter
à diverses époques le renouvellement de celles-ci,
qui, je pense, purent appartenir aux dernières
époques florissantes de l’empire. Au reste,
comme j’en ai déjà fait la remarque, ces pyramides
sont redevables de l’état étonnant de
conservation où elles se trouvent, à leur position
sur un roc élevé, où les eaux ne séjournent
point, tandis que les monumens de la plaine
ont la plupart disparu. Les ruines d’el-Meçaourât,
de Naga au mont Ardân, et celles de Sôbah, sur
le fleuve Bleu, qui toutes attestent l’existence de
grands établissemens dans cette partie de l’île de
Méroé, appelleront sans doute les méditations
des érudits; je me bornerai donc à consigner ici
quelques réflexions.
L’empire de Méroé, dit Hérodote, était gouverné
par la caste sacerdotale ; c’était aux prêtres
qu’était confiée la direction des lois et de l'instruction
publique. EI-Meçaourât fut évidemment le
lieu où, loin du tumulte des villes, ils initiaient
de jeunes adeptes à la connaissance des dogmes
religieux et des sciences dont ils étaient dépositaires.
Sa position entre deux villes importantes,
celle de Méroé, à dix-huit lieues au nord, et celle
qui existait où sont les ruines de Naga, à cinq
lieues au sud, indique des communications habituelles
avec ces lieux peu éloignés. La latitude*
d’el-Meçaourât, que j’ai trouvée être par 16° 25',
répond parfaitement à celle de 16° 26', que Pto-
lémée, d’après une observation de solstice, assigne
à Méroé. Doit-on conclure de cette conformité
remarquable que c’est à Naga, comme point
le plus rapproché, qu’il faudrait reconnaître l’assiette
de cette ville? Mais l’autorité de Ptoïémée
seul ne peut balancer celle de plusieurs autres
qui s’accordent sur sa distance au-dessus de l’Atbarah.
D’ailleurs, le lieu qui porte aujourd’hui
le nom d’el-Meçaourât, était, à n’en pas douter,
une des résidences, la résidence principale, des
hommes entre les mains desquels était le pouvoir,
d’après Hérodote : n’est-il pas probable,
dès-lors, qu’identifiant cet établissement avec la
capitale de l’île, ce soit de ce point même que
Ptoïémée ait réellement donné la position ?
Parmi les villes que Ptoïémée cite comme dépendant
de Méroé, qu’il place dans l’intérieur de
l’île, il en est une du nom de Coloe : elle est, dit-
il , la première ville où se fait le commerce de
l’ivoire, qu’on y porte du port d’Adulis; ce qui