consiste en quelques cabanes en paille. Le Nil
ici tourne tout-à-fait dans l’ouest. Nous y trouvâmes
quelques Gellabes qui arrivaient de Sebou’.
Les tourbillons de sable et le vent brûlant du sud-
ouest les avaient cruellement incommodés; ils
s’étarent vus contraints de rester deux jours de
plus au désert : il leur avait fallu sans cesse faire
coucher leurs chameaux, et s’étendre près d’eux
pour s’en faire un rempart contre les coups de
vent brûlans qui menaçaient de les suffoquer.
Malgré le soin qu’ils avaient pris d’abriter leurs
outres autant qu’ils le pouvaient , l’eau s’y
était desséchée en partie, et ils en manquèrent
durant deux jours. Arrivés à la vue du Nil, le
plus courageux d’entre eux courut s’y désaltérer,
et chargea de l’eau sur son chameau pour la
porter à ses compagnons d’infortune, qui n’avaient
plus la force de se traîner jusque là. Encore quelques
heures de plus, et la plupart de ces malheureux,
peut-être tous, auraient subi le sort de
l’armée de Cambyse dans le désert de Libye.
Lorsque les naturels , habitués aux fatigues et
aux privations de tout genre, sont réduits à un
tel état de détresse, combien doivent être horribles
, dans une pareille position, les angoisses
des Européens ! J ’allai à une heure de là visiter les
ruines d’une ancienne forteresse nommée el-Kar-
mel: elle est construite en grosses briques crues,
s u r u n rocher de granit élevé, près du fleuve. On
reconnaît de gros murs extérieurs en style pyramidal
, e t, dans l’intérieur, des murs de refend formant
beaucoup de chambres. J avais sans doute
sous les yeux l’une des forteresses des anciens,
telles qu’ils auraient dû les représenter dans leurs
sculptures; car je persisterai toujours à dire que
ces grandes constructions étaient des massifs de
murailles, soit en terre, soit en pierres brutes, et
non en pierres taillées, comme pourraient le faire
croire les lignes d’assises régulières tracées dans
ces mêmes sculptures. Aucun de ces monumens
ne se trouve ainsi en Égypte. Peut-être que cette
forteresse fut celle où se retira la reine Candace
en fuyant de Napata*; car, s’il faut en croire
r * Strabon, liv. x v n , page 819. « Les E thiopiens, profitant d’an
moment où l'Egypte était dénuée de troupes, tombèrent sur la
Thébaïde et sur les trois cohortes qui gardaient les environs de
gyène : dans cette attaque subite et im prévue, ils eurent le temps
de s’emparer de cette ville , d’ÉIéphantine et de P h ilæ , d’en faire
prisonniers les hahitans et de renverser les statues de César-
Auguste; mais Pétrone, survenant avec moins de dix m ille fantassins
et huit cents chevaux, attaqua leur armée composée de
trente mille hommes , poursuivit les Ethiopiens , prit d’assaut la
ville de Pselcis , atteignit Prem nis, l’emporta d’em b lée, et s’avança
jusqu’à Napata, capitale du royaume de Candace. A l’approche de