Le 9 février, les troupes espéraient pouvoir
se reposer des fatigues de la nuit et des journées
précédentes, lorsque, vers le milieu du jour,
les negres, cachant leur marche à la faveur d6s
arbres et se tenant a couvert dans un ravin,
descendirent de nouveau et s’avancèrent avec
audace et intrépidité jusqu’à une portée de fusii
du camp. Là ifs frappèrent de leurs lances et
de leurs couteaux plusieurs domestiques qui y
avaient mené boire les chameaux et les chevaux
du pacha , s emparèrent de ces derniers, et
prirent la fuite. Ces chevaux, au nombre de
huit, étaient les seuls de quelque valeur qui lui
restassent. Ce n est que par les cris des domestiques
qui accoururent couverts de sang, que
l’on fut averti de la présence de l’ennemi. On
se hata de courir à sa poursuite ; mais le résultat
de cette expédition se réduisit à la capture de
trois nègres. Ces malheureux furent mis sous le
bâton pour les interroger sur le nombre et sur
les projets de leurs compatriotes. Après avoir
reçu une centaine de coups, ils avouèrent qu’il
avait été convenu qiie les negres de Qamâmyl
et des environs viendraient se réunir à ceux de
Singué ; que ces auxiliaires étaient en partie
arrivés ; que tous, à la même heure, devaient
l’attaquer sur trois points différens, de l’est, de
l’ouest et du nord ; que les leurs s’étant avancés
trop tôt, et ayant cédé à la tentation de s’approprier
des chevaux, avaient ainsi fait manquer
le plan d’opération. Plus tard, nous aperçûmes
en effet au nord un parti de nègres qui, se
voyant seuls, n’osèrent pas descendre. L’aveu
de ces prisonniers, qui paraissait sincère, ne
laissait pas detre très-alarmant. On était près de
manquer de munitions; les Turcs, privés du
seul moyen qui pût les rendre redoutables et
leur assurer de la supériorité, étaient bien loin
d’être assez nombreux pour tenir tète à tous les
nègres réunis de la contrée : ceux-ci d’ailleurs,
encouragés par Te peu de succès des tentatives
que le pacha avait faites contre eux, redoublaient
d’audace; la bravoure des Osmanlis et le clinquant
de leurs armes ne leur inspiraient plus
autant de crainte; ils avaient même remarqué
que le canon faisait plus de bruit qu’il ne causait
de ravage parmi eux. Leurs villages, leurs récoltes
, devenant chaque jour sous leurs yeux
la proie des flammes, léurs champs dévastés,
leurs femmes, leurs enfans, enlevés avec violence
et réduits en esclavage, tout se réunissait pour
pousser ces hommes au désespoir et les ex