à Suéïny, village à cinq jours de Cobbé, capitale
de la province. On nomme habir le chef désigné
par le roi pour diriger la caravane. En trois
jours elle vient à-Madoua, où l’on trouve parfois
de l’eau de pluie. De là elle en met huit pour se
rendre à Bir el-Malh [puits d’eau salée]; en effet
l’eau y est saumâtre : ce lieu fournit à l’Egypte
beaucoup de natron, qui y est estimé. Quatre
jours après , elle arrive à el-Eguy, où l’on ne
trouve point de dattiers; l’eau y est saumâtre:
d’el-Eguy à Sélimeh, elle a quatre jours dé marche.
A trois jours plus au sud * elle séjourne encore
à Cheb ( dont le nom signifie Alun \ lièu où l’on
trouve quelques végétaux : son territoire fournit
une terre alumineuse rougeâtre, dont il se fait
en Egypte un bon débit. A cinq jours de là, la
caravane s’arrête à Berys, village dépendant de
l’oasis de Khargeh, où elle trouve beaucoup de
ressources ; et après avoir passé à Boulak, autre
village de la même oasis, elle arrive au bout de
deux jours à Khargeh, qui en est le chef-lieu.
Elle séjourne ici assez long-temps, et s’y procure
tout ce qui lui est nécessaire. Les chefs de la caravane
vont en avant prévenir de leur arrivée le
gouverneur de Syout, et demander la permission
d’y entrer. Ce gouverneur envoie jusqu’au
Khargeh des douaniers chargés de prendre
compte des marchandises et de fixer les droits
a percevoir. Alors la caravane se dirige sur cette
ville, et s’y rend en six ou sept jours. Ainsi, de
Cobbé jusque-là , elle a eu quarante jours de
marche. A leur arrivée, esclaves et animaux,
tous se tramant à peine, offrent un spectacle
vraiment pitoyable \ Un Européen ne saurait
voir sans un pénible serrem nt de coeur, des
milliers de malheureux des deux sexes, décharnés,
presque nus, portant sur leur physionomie
l’empreinte de la tristesse et des regrets, et qui,
tramés de contrée en contrée par de cupides
marchands, tombent, exténués de fatigue et de
misère , sur le sol du marché ou on les exposé
en vente.
Après avoir pris deux jours de repos à Sélimeh,
nous en partîmes dans la soirée du 29 mai ; et
faisant, la nuit, de fortes marches, nous revînmes
par la même route à Byr-Daffer, le 31
au soir, bien fâchés d’avoir fait, à-peu-près en
pure perte, soixante lieues dans un désert aride,
par des chaleurs assez constantes de 35 à 45
degrés.
* On a compté diverses fois plus de quatre cents esclaves morts
dans la traversée.