Le 5 au soir, je reçus une lettre de M. Le*
torzec qui vint mettre obstacle à mon voyage:
elle m’apprenait que des voleurs setaient introduits
nuitamment dans ma maison par un trou
qu’ils avaient pratiqué sur la terrasse, et qu étant
descendus dans la pièce voisine de celle où il
dormait, ils m’avaient enlevé environ 1200 francs,
seul argent que je possédasse alors, ainsi que
des armes ", du linge et divers effets. M. Letorzec
m’engageait à revenir pour faire les recherches
nécessaires. Tout m’y obligeait; car ma.bourse
était épuisée : je partis donc aussitôt de nùit.
Le 6, en passant à Farchout, j’appris qu’Ibrahym
pacha venait d’y arriver du Caire. J’eus un grand
plaisir à le revoir. Nous parlâmes beaucoup de
l’expédition de son frère Ismâyl. Il ne pouvait
pas se persuader que nous eussions bien constaté
les misérables produits des fameuses mines
d’or; le petit nombre de nègres que cette expé-
dïtiôn avait procures, lui faisait croire aussi que
son frère n’avait déployé ni assez d’activité , ni
assez d’énergie. Je ne fis que . rendre hommage à
la vérité, en lui retraçant les efforts que ce prince
avait faits, les obstacles quibavait eus à vaincre,
les dangers qu’il avait courus, le courage et le
sang-froid qu’il avait constamment fait paraître*
Jélui parlai enfin du vol dont je venais d’être la
victime. Il me donna des ordres pour les kâchefs
des environs de Thèbës, et je pris congé de lui.
Le 6, j’arrivai à Gournâh : les coupables devaient
sans doute être du village pour si bien
connaître la disposition de mon logement et
avoir eu si vite connaissance de mon départ. L’instrument
dont ils s’étaient servis pour percer la
terrasse1, était le fer d’une lance,' qu’ils avaient
abandonné dans leur fuite : mais les Arabes se
soutenant tous entre eux, personne n’eut l’air
de reconnaître cette pièce de conviction. Monté
sur un de mes dromadaires, je parcourus en
toute hâte les environs, pour y voir les kâchefs ,
et leur communiquer les ordres du pacha; j’ajlai
à Gâmol, à Qoûs, à Qéneh, je revins à Gournah,
courus à*Esné, cherchant par-tout dans les bazars
si j’y découvrirais quelques-uns de mes
effets. Peines perdues ! soins inutiles ! j’eus à
regretter de plus la fatigue d’une course de plus
de quatre-vingts lieues, et le sacrifice d’un temps
d’autant plus précieux, que j’approchais du terme
où je devais quitter l’Egypte. Ce fâcheux contretemps
m’obligea de renoncer au voyage dés oasis.
Je ne pouvais, sans m’exposer à de trop longs
retards, faire venir des fonds du Caire; il ne me