VOYAGE À MÉROÉ,
mans; déjà, dans quelques villages, on avait
massacré les soldats qui y tenaient garnison.
Heureusement l’arrivée des troupes d’Ibrahym
avait comprimé l’effervescence; mais il existait
encore des symptômes d’insurrection dans les
provinces d’Haïfây et de Chendy. Cette dernière
circonstance était fort inquiétante pour nous. La
barque sur laquelle nous étions venus avait continué
immédiatement sa route; quelque commode
que fût cette manière de voyager, elle ne pouvait
s accorder avec mes plans : la barque ne devait
s ai i eter nulle part ; il m eut fallu renoncer par
conséquent à toute espèce d’explorations, et
c était un parti que je n’aurais voulu prendre qu’à
la dernière extrémité. J ’avais donc décidé d’effectuer
par terre mon retour en Égypte. L’état de
langueur où se trouvait encore M. Letorzec,
m’obligeait à partir bientôt. Divan-Effendy
promit qu’il me ferait escorter jusqu’à Arbagui,
et qu’il me donnerait un ordre pour que tous
les chefs de villages me fissent ensuite accompagner
par des hommes affidés.
J ’avais espéré que je reverrais des ibis à mon
retour au Sennâr ; mais il ne me fut plus possible
d en découvrir un seul . Les,indigènes nomment
Je m en Consolais en pensant qu’un de ces oiseaux, dont
CHAPITRE XLIV- 77
cet oiseau assimbira; il est noir avec quelques
plumes d’un vert bronzé aux ailes; le bec et la
queue sont de moyenne grandeur. On trouve aussi
au Sennâr un ibis blanc ; il se nommé bilibily. Ces
oiseaux n’habitent la vallée du Nil que quelques
mois avant la chute des pluies ; les noirs sur-tout
sont très-communs. Ils sont assez familiers, et se
perchent souvent sur le sommet des cabanes. Au
commencement de la saison pluvieuse, ils disparaissent
totalement. Dans les pays couverts de
bois que nous parcourûmes, jusqu’au 10.e degré
nord, il ne s’en offrit jamais un seul à nos regards,
Lorsque ces oiseaux paraissent dans la vallée du
Nil, on en voit seulement un petit nombre atteindre
jusqu’à l’Atbarah. Nous en mangeâmes
un sur l’île de Méroé ; sa viande avait un goût
de poisson. Je questionnai des naturels sur la
désertion subite et générale des ibis : ils me
répondirent que ces oiseaux font comme les
hommes, qui fuient ,à la même époque qu’eux, le
j’avais envoyé la dépouille au Caire, était là en sûreté; mais
j’appris plus tard que M. Champion, vice-consul au Caire, chez
qui onTavait déposé, s’en était dessaisi en faveur d’un naturaliste
prussien. Espérons que cet objet curieux, perdu pour moi, ne
le sera pas du moins pour les sciences ; car j’apprends que ce
voyageur vient d’arriver à Berlin, où il s’occupe de la publication
des matériaux qu’il a recueillis.