La couleur de son pelage se rapprochait aussi de celle du Mandrill, seule,
ment elle était plus verdâtre aux parties supérieures, et il y avait plus de blanc
aux autres parties. Le dos, les côtés du corps, la tête, la face extérieure des
membres, et une bande au bas du cou, en avant des pattes antérieures, étaient
couverts de longs poils très-fins, gris à'ieur moitié inférieure, et alternative,
ment noirs et. jaunes à leur autre moitié. Ce sont ces deux dernières couleurs
qui formaient la teinte verdâtre de l’animal , à toutes les parties supérieures
du corps. Des poils également longs et fins, d’un blanc-grisâtre, garnissaient
toutes les parties inférieures. Cependant la diverse direction des poils et la plus
ou moins grande étendue de l’une ou de l’autre de leurs couleurs., présentaient
des modifications qui sont peut-être caractéristiques.
Ainsi ceux qui garnissent les joues ne rencontrant point la base de ceux
qui naissent derrière eux sur le cou, il en résulte que la moitié inférieure et
grise de ces derniers, n’est point cachée comme aux autres parties, et que là
elle présente une sorte de collier gris, qui commence sous le cou, et qui se termine
au-dessus de l’oreille. Ces poils ,des joues sont assez rares ; ils ont moins
de noirs que les autres, et sont couchés en arrière; ceux qui garnissent en-
dessous la mâchoire inférieure sont jaunes, et forment une sorte de barbe.
Les poils■ du dessus de la tête , se réunissent vers la ligne moyenne en une
petite crête que l’âge rendra vraisemblablement plus grande. Les poils de la
queue sont gris et disposés en pinceau. La face et les oreilles sont nues, ainsi
que le derrière de celle-ci, et il en est de même des fesses et des testicules.
Les doigts ne sont garnis que de quelques poils, et la plante des pieds, comme;
la paume des mains y en son4^tout-à-fait dénuées. La peau de toutes les parties
couvertes est bleue , et cette couleur" 's’aperçoit un peu au travers du pelage,
sur les côtés des fesses et à la partie postérieure des mâchoires, où les poils
sont plus rares qu’ailleurs. La face est entièrement noire, et deux côtes larges,
saillantes et ridées, mais non plissées comme celles du Mandrill, garnissent
les côtés du nez. Les mains antérieures et postérieures ont une teinte cuivreuse;
.les fesses et les testicules sont d’un rouge très-vif.
La femelle ne diffère du mâle que par une tête moins allongée, par sa taille,!
et par la teinte beaucoup plus pâle de son pelage. Sa longueur, du bout duI
museau aux callosités des fesses, est de 18 pouces, sa hauteur de 16, au traioI
de devant, le train de derrière est plus bas ; les tons verdâtres ne sont bien I
marqués que sur les membres et sur la tête, et le gris domine à la partiel
postérieure du dos et sur les flancs. A l’époque du rut, c’est-à-dire tous les trenteI
jours environ, le sang se porte aux organes génitaux ; toutes les parties environ!
nantes se tendent, se gonflent, et bientôt elles ne présentent plus qu’une forte protubérance
, plus large du côté de l’anus que du côté opposé; dans cette dernièreI
partie est un étranglement qui partage cette protubérance en deux portions I
inégales; le clitoris est à son extrémité inférieure, et consiste simplement enI
un léger tubercule, placé entre deux plis qui sembleraient être les rudimenlsl
des nymphes et leur extrémité, dans le cas où l’on voudrait trouver quelque ana l
logie entre elles et les parties qui prennent cet accroissement monstrueux.
Si nous rapprochons actuellement la description que j’ai publiée du Siné I
Leucophea, de celle que je viens de donner du mâle et de la femelle adultes de
cette espèce, nous voyons dans le jeune âge la tête plus arrondie, les crêtes
sourcilières moins développées, et les teintes du pelage plus grises et se rapprochant
de celles qui sont propres â la femelle; les autres parties du corps
ont les mêmes formes et les mêmes proportions que dans l’adulte, et présentent
tous les caractères essentiels à l’espèce.
Un nom était nécessaire à ce cynocéphale nouveau, celui de Babouin des Bois,
{JVood Baboon) en supposant qu’il lui appartînt, serait assez peu convenable. Le
grand rapport qu’il a avec le Mandrill, puisqu’il n’en diffère guère que par les
couleurs de la face, m’a suggéré l’idée de lui donner le nom de Drill, qui a l’avantage,
en quelque sorte, d’indiquer les rapports intimes de ces deux espèces.
On a cru pouvoir rapporter le Simia Leucophea au Yellow Baboon de P e n n a n t ;
mais les Mandrills, perdant après leur mort les belles couleurs rouges et bleues
qui les caractérisent, et le Yellow Baboon n’ayant été représenté et décrit que
d’après un animal empaillé, il ne se rapporte pas plus au Drill qu’au Mandrill,
et on peut en dire autant des autres Babouins à courte queue, dont parle
P e n n a n t s o u s les noms de Cinereos Baboon et de JVood Baboon.
Je n’ai pas eu cet animal assez long-temps en ma possession pour étudier
son intelligence et son caractère. Il ressemblait sans doute aux cynocéphales,
par ses facultés intellectuelles comme par son organisation ; tout ce que j’ai
pu voir, c’est qu’il était assez doux, et qu’il répondait par de grands témoignages
de joie aux caresses de son gardien ; mais on ne doit pas oublier qu’il était
encore très-jeune.
Décembre 1818.