2 LA MO NE.
a une femelle dont la tête est grise; et, outre notre cerf de Virginie, il y
en a deux ou trois autres espèces dans cette contrée.
On regarde communément la Mone comme originaire de Barbarie, quoiqu’on
n’en rapporte aucune preuve. Toutefois elle nous vient certainement
d’Afrique; et, à la facilité qu’elle a de vivre chez nous, on peut conjecturer
qu’elle se trouve principalement dans les régions septentrionales ou dans les
parties élevées de ce continent.
Le bel individu que j’ai fait représenter s’est, pour ainsi dire, développé sous
mes yeux. Il était extrêmement jeune lorsque notre ménagerie en fit l’acquisition;
et sa douceur, mais sur-tout son peu de pétulance, permirent de le
laisser en liberté. L’âge n’a point encore altéré son bon naturel ; il est devenu
grand et a pris de la force; son adresse est extrême et son agilité sans égale;
cependant tous ses mouvements sont doux, et ses actions semblent circonspectes
; ses désirs ont de la persévérance, mais ils ne le portent jamais à rien
de violent. Lorsqu’après avoir bien sollicité, on persiste à le refuser, il fait
une gambade et semble occupé d’autre chose; il n’a acquis aucun sentiment
de propriété: il prend tout ce qui lui plaît, les objets qui lui ont attiré
des punitions comme les autres, et il a une adresse extrême pour exécuter
ses rapines sans bruit; il ouvre les armoires qui ont leur clef, en tournant
celle-ci ; il défait les noeuds, ouvre les anneaux d’une chaîne et cherche dans
les poches avec une délicatesse telle, que souvent on ne sent pas sa main
quoiqu’on sache qu’elle vous dépouille. C’est l’examen des poches qui lui
plaît le plus, parce que sans doute il y a souvent trouvé des gourmandises
qu’on voulait qu’il y trouvât, et il y fouille sans mystère; ordinairement il débute
par là, dès qu’on s’approche de lui, et semble chercher dans les yeux ce
qu’il doit espérer de trouver. 11 n’est pas très-affectueux ; cependant, lorsqu’il est
tranquille et que rien ne le préoccupe, il reçoit avec plaisir les caresses; et
il répond avec grâce lorsqu’on veut jouer avec lui ; alors il prend toutes les
attitudes possibles, mord légèrement, se presse contre vous, et il accompagne
toutes ces gentillesses d’un petit cri assez doux, et qui semble être pour lui l’expression
de la joie. Jamais il ne fait aucune grimace; sa figure, bien différente
de celle de la plupart des autres singes, est au contraire toujours calme,
et paraîtrait même sérieuse; et, quoiqu’il soit mâle, il n’a jamais manifesté
la lubricité qui rend la plupart des singes si dégoûtants.
Je ne dis rien des caractères généraux de cet animal : ils sont les mêmes
que ceux des guenons dont j’ai déjà parlé , sans aucune exception; et en les
décrivant, je ne ferais que répéter, mot pour mot, ce que j’ai dit sur ce sujet
à l’article du Malbrouk. La Mone a été décrite plusieurs fois d’après nature.
Brisson la nomme Singe varié, ainsi que Penriant ( varied Monkej) ; et c’est
sans doute parce qu’il la décrivait d’après un individu desséché, que le premier
lui donne une figure noire. Buffon en a publié deux figures (T . 14 ? pl-
36; et sup., t. 13 , pl. 19)- Schreber, outre la première de Buffon, qu’il a fort
mal enluminée, en donne deux autres plus reconnaissables, planches XV et
XV B. ; mais celle-ci , sous le nom de Monacha, n’aurait point les taches
blanches des côtés de la queue. Audebert en a aussi donné une figure passable.
C’est le Simia Mona des auteurs systématiques.
Août, 1819.